Dette totale française : une légère baisse en trompe-l’œil due à l'inflation

La dette de la France a augmenté de 100 points de pourcentage en vingt ans, particulièrement lors des périodes de crise économique. On constate cette progression aussi bien pour la dette publique que pour la dette des entreprises et des ménages. Jusqu’où ira cette folie, qui déclenche généralement de graves crises économiques à long terme ?

Graphe Économie
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publié le 13/07/2023 Par Olivier Berruyer
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La dette totale est le cumul de celle des administrations publiques, des ménages et des entreprises. Depuis le début des années 2000, la dette totale française a connu une très forte croissance, passant d’un peu plus de 2 000 Md€ à près de 7 000 Md€.

La dette privée supérieure à la dette publique

En une vingtaine d’années, le poids de la dette totale de la France, exprimée en pourcentage du PIB, a pratiquement doublé.

On parle beaucoup de la dette publique française, mais il est important d’analyser également la dette privée – ménages et entreprises ; en effet, celle-ci représente environ 60 % de la totalité de la dette française.

Sur la période récente, on est frappé par les très fortes hausses de l’endettement public à l’occasion des crises de 2008 et 2020. Mais toutes les dettes sont orientées à la hausse depuis 20 ans, à un rythme de croissance nettement supérieur à celui du PIB. Le poids de la dette des ménages a ainsi doublé, quand celui des entreprises a augmenté de 50 %.

Les ratios d’endettement ont été orientés à la baisse en 2022, mais cela est tout à fait normal. C’est un simple effet de l’inflation, qui fait augmenter le PIB à un rythme supérieur à celui de la dette. Le ratio Dette/PIB baisse donc.

7 % d’endettement trimestriel en 2009, 23 % en 2020

Si l’on observe l’évolution de l’endettement par période, on perçoit mieux les pics d’augmentation de la dette publique et privée lors des grandes crises. Les entreprises ont eu largement recours au crédit pour surmonter la crise de 2008, et l’État a soutenu l’économie en dépensant jusqu’à 5 % du PIB lors des deux premiers trimestres 2009.

On perçoit aussi le cataclysme économique qu’a été la crise du Covid-19. Au deuxième trimestre 2020, l’endettement total de la France a ainsi augmenté de 23 %, dont 13 % de dette publique, 8 % de dette des entreprises et 3 % de dette des ménages. C’est plus de trois fois supérieur au pic de la crise des subprimes.

Sur une courbe lissée et sur une période plus large, on peut aussi mieux se rendre compte des périodes d’endettement et de désendettement de l’État et des entreprises. L’État n’a ainsi connu que deux périodes d’important désendettement (en % du PIB, pas en absolu) au cours des quarante dernières années : en 1999/2000, en raison des efforts afin d’entrer dans l’euro, et en 2006/2007.

Les entreprises se sont quant à elles désendettées entre 1992 et 1998, puis entre 2002 et 2005 et entre 2011 et 2012. Enfin, les ménages se sont endettés quasiment sans interruption depuis 40 ans en raison de la bulle immobilière.

Une accélération de l’endettement public récente

Sur le temps long, on peut constater que la tendance à l’endettement de l’économie française ne date pas d’hier. La dette totale a quasiment augmenté au même rythme entre 1980 et 2007, doublant presque durant cette trentaine d’années. Ce sont surtout l’État et les ménages qui ont soutenu cette croissance.

Cependant, à partir de 2008, ce processus s’accélère : elle augmente encore de moitié entre 2008 et 2022, portée par l’endettement de tous les secteurs.

Sur le long terme, la tendance au surendettement a touché de la même manière le secteur privé et le secteur public.

Pour résumer, la dette totale de la France a autant augmenté au cours des 30 années précédant la crise des subprimes qu’au cours des 10 années qui lui ont succédé. L’endettement s’est donc énormément accéléré depuis dix ans, en raison des subprimes et du Covid-19.

On peut donc se demander jusqu’à quand va durer une telle folie économique, qui consiste généralement à s’endetter pour financer des dépenses plus ou moins courantes. Cette voie du surendettement est un chemin fréquemment emprunté par les agents économiques quand les difficultés s’accumulent. Mais c’est hélas historiquement la voie royale vers les très graves crises financières, comme le soulignait très justement le prix Nobel d'économie Maurice Allais :

« Ce qui, pour l'essentiel, explique le développement de l’ère de prospérité générale, aux États-Unis et dans le monde, dans les années qui ont précédé le krach de 1929, c'est l'ignorance, une ignorance profonde de toutes les crises du XIXe siècle et de leur signification réelle. En fait, toutes les grandes crises des XIXe et XXe siècles ont résulté du développement excessif des promesses de payer et de leur monétisation. Partout et à toute époque, les mêmes causes génèrent les mêmes effets et ce qui doit arriver arrive. »

Encore de futurs ennuis en perspective ?

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