Cet article peut se lire dans la continuité de « Censure d’internet : la chimère du législateur », comme un approfondissement de l’univers de la modération et de la censure des espaces numériques, auquel vient s’ajouter la surcouche des projets législatifs de suppression de contenu.

publié le 20/09/2022 Par Thomas Le Bonniec
Censure, orientation des comportements : les pouvoirs des géants du numérique

Soutenir que la liberté d’expression est muselée par les réseaux sociaux est un lieu commun : cette phrase n’offre aucune prise en soi.

Prenons donc le temps d’essayer de comprendre comment se fabrique l’expression dans les espaces numériques, comment elle est fragmentée, et en quoi il est difficile de s’extraire d’une régulation privée que les États essaient aujourd’hui de rattraper. Commençons donc par un symptôme, qui permet de rentrer dans le sujet par le bas : c’est-à-dire la censure « ressentie » et visible. Thibault Prévost, journaliste chez Arrêt Sur Images, écrit ainsi en juin 2022, dans un article intitulé Algospeak : les influenceurs, bilingues en censure automatisée :

« Pour échapper aux robots-censeurs, les utilisateurs de TikTok et d'Instagram ont développé leur propre dialecte : l'algospeak. Une nouvelle preuve que, sur internet, même le langage a été privatisé. [...] C'est inquiétant parce que l'attitude des plateformes quant à la modération des contenus est celle d'un État autoritaire orwellien, celle de la Russie et de la Chine : il existe des listes de mots interdits, qui changent sans cesse, mais que personne n'a le droit de consulter. Les utilisateurs affrontent un adversaire tout-puissant, arbitraire et opaque, qui ne daigne jamais expliquer les règles qui régissent son territoire, et face à qui les recours légaux n'ont aucun effet. »

The Guardian révélait en 2019 que TikTok avait modifié ses directives pour « bannir tout contenu qui serait considéré comme positif à l'égard des personnes homosexuelles ou des droits des homosexuels, jusqu'aux couples de même sexe se tenant la main, y compris dans des pays où l'homosexualité n'a jamais été illégale ».

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