L'ouvrage Noir Canada. Pillage, corruption et criminalité paru en 2008 aux éditions Écosociété révélait le soutien massif de l’État canadien aux compagnies minières du pays, et ce en dépit des abus que certaines d'entre elles commettent en Afrique. Cela valu à la maison d'édition et aux trois auteurs des poursuites en diffamation d'un total de 11 millions de dollars par deux sociétés minières canadiennes. Anne-Marie Voisard, responsable des affaires juridiques aux éditions Écosociété de 2008 à 2013, et qui se trouvait au cœur de l’affaire Noir Canada, revient sur cette affaire dans son essai Le droit du plus fort (Écosociété), récompensé par le prix littéraire du Gouverneur général du Canada (catégorie essai). Elle y voit un révélateur de ce qu’est devenu le droit, un des instruments les plus puissants du capitalisme extractif. Entretien.

Laurent Ottavi (Élucid) : Pouvez-vous rappeler ce qu’est le livre Noir Canada et ce qu’il mettait en cause ?
Anne-Marie Voisard : Noir Canada. Pillage, corruption et criminalité en Afrique, cosigné par Alain Deneault, William Sacher et Delphine Abadie, est un ouvrage tristement fameux au Québec, en raison des poursuites en diffamation pour 11 millions de dollars qu’il a valu à ses auteurs et son éditeur. Publié en 2008 aux éditions Écosociété, une maison d’édition indépendante et engagée basée à Montréal, Noir Canada prend à contre-pied l’image de bienfaiteur que le Canada cultive sur la scène internationale, celle d’un pays vertueux, humanitaire, et « ami » du continent africain.
Nourri par une documentation internationale très abondante, l’ouvrage recense et analyse un grand nombre de cas allégués d’abus, de violations de droits, de corruption, voire de crimes, dont se rendraient responsables certaines sociétés extractives canadiennes opérant en Afrique, et ce dans une impunité quasi totale. Surtout, Noir Canada cherche à lever le voile sur la manière dont l’État canadien soutient ces industries, tant sur le plan diplomatique que financier et juridique, en dépit d’allégations très graves sur les impacts qu’auraient leurs activités à l’étranger. Ce n’est pas un hasard si 75 % des entreprises extractives mondiales étaient enregistrées au Canada au moment de la publication de l’ouvrage. Le Canada est un véritable paradis judiciaire et fiscal pour les compagnies minières qui y établissent leur siège social.
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