Quand le commentaire prolifère, dans les journaux, les télévisions, les radios et les réseaux (anti)sociaux, c'est la réalité qui recule. Effacer la Question sociale, ridiculiser la vie des idées, rendre indigne la politique : telle est la fonction sociale des Pascal Praud et autres éditorialistes de plateau.

publié le 08/02/2025 Par Mikaël Faujour

Certains individus se font un honneur des insultes et de la haine dont ils font l'objet : Jean-Edern Hallier, plagiant peut-être Jules Barbey d'Aurevilly, a ainsi un jour déclaré que sa vie n'était qu'« une cathédrale de crachats ». Au moins avait-il, lui, un certain panache. À l'inverse, la détestation dont fait l'objet Pascal Praud revient à gonfler d'importance un demi-pas-grand-chose. S'il incarne, certes, le déshonneur du journalisme – mais il n'est pas le seul… et est-il vraiment journaliste, d'ailleurs ? – moins qu'un individu pensant, il ne mérite guère de statut plus élevé que celui de symptôme.

Symptôme de l'état de déchetterie intellectuelle qu'est le débat public, soit ! – mais, surtout, d'une certaine place que lui accorde l'espace médiatico-politique dominant qui tient lieu d'agora démocratique et d'un certain rapport à celui-ci.

L'inconséquence comme déontologie

Le passage de Pascal Praud du monde du football aux polémiques sur l'actualité relève non d'une bifurcation, mais d'un continuum tout symbolique : les télé-bavards ne sont que les commentateurs de football de la vie politique.  Car lorsque M. Praud et sa cour d'affidés praudisent – comme d'autres duhamélisent, barbiérisent, thréardisent, onfraytisent ou giesbiertisent du matin au soir urbi et orbi –, c'est en se pensant extérieur et en surplomb, par-delà bien et mal – vieux mirage libéral de « l'objectivité » et de « l'expertise » (1).

Le regard jubilant, ils analysent les guéguerres de carriéristes et esclandres verbales qui rythment la vie politique, les stratégies, calculs et rebondissements, comme on commente un match. Leur langue corrompue le scande : on « marque des points », on « botte en touche », on se « tacle » et on se prend parfois un « carton rouge », etc.

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