Quand Emmanuel Macron intitule son livre Révolution, quand des « socialistes » dirigent les instances mondiales du néolibéralisme et quand les champions de la « tolérance » insultent et calomnient à l'envi, certains mots semblent masquer la réalité même, contraire à leur sens. Quand les mots n'ont plus de sens, débattre démocratiquement d'un commun est-il encore possible ?
« La culture, moins on en a, plus on l'étale ». « Le sexe, ce sont ceux qui en parlent le plus qui en font le moins ». « C'est celui qui dit qui y est ». S'ils font sourire, ces dictons populaires et expressions enfantines n'en manifestent pas moins un appel de bon sens à la prudence et à l'incrédulité, car certains mots peuvent servir à occulter leur sens véritable et dissimuler ce qui est absent.
Politique, monde militant, bavardages médiatiques et débats intellectuels offrent pléthore d'exemples. La présidence de George W. Bush (2000-2008) vaut ainsi cas d'école. On parlait de « vérité » tandis que le secrétaire d'État Colin Powell mentait devant les Nations unies sur des « armes de destruction massive » inexistantes ; on parlait de « liberté » tout en adoptant un Patriot Act liberticide...
Au terme d'une séquence politique sur la réforme des retraites qui a mis en évidence l'esprit antidémocratique du président français et de son gouvernement, le discours du lundi 20 mars d’Élisabeth Borne devant l'Assemblée nationale a fourni une autre illustration non moins édifiante. Ainsi, visant l'opposition, elle pointait « certains élus de la Nation [qui] ont une nouvelle fois montré le peu de cas qu'ils faisaient du débat, du parlement, de la démocratie ».
Pour imposer une réforme rejetée par 93 % des actifs et 79 % des sondés, considérée inutile y compris par la finance, le larbinat de la République en marché (désormais Renaissance) ne venait-il pas pourtant de déployer toutes sortes de malhonnêtetés et stratagèmes pour escamoter le débat parlementaire et nier les faits opposés ? Le toupet hypocrite de Mme Borne n'est pas sans comique, quand elle dénonce « l'antiparlementarisme » et « le mépris des institutions » de l'opposition qui aurait « tout fait pour saboter les débats ». Ni sans obscénité quand elle se félicite de ce que l'adoption de la réforme – non votée, en raison du recours au 49-3 – serait le fruit de la « concertation » et du « débat contradictoire ».
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