L'ancien conseiller diplomatique du général de Gaulle raconte comment ce dernier trouvait inconcevable que l'Europe puisse être une idéologie, et rejetait le projet fédéraliste des adeptes de Jean Monnet. Il voyait l'ambition de puissance nécessairement associée à une volonté d'indépendance et dès lors, la construction européenne ne pouvait selon lui être confiée à des technocrates, au risque de d'être une « histoire pour professionnels sans avenir ».
Dans cet entretien inédit réalisé par Olivier Berruyer en 2014, Pierre Maillard soutient que « les capacités d'action et l'existence même de la France » - en tant que nation maîtresse de son destin - sont aujourd'hui « en péril ». Il dénonce la volonté des tenants de l'Europe de « régler son compte à la nation », usant d'arguments fallacieux pour porter atteinte à la souveraineté de la France, pourtant seule à même de « défendre l'intérêt national contre les soi-disant lois du marché ou exigences de la mondialisation ».
Pierre Maillard (1916-2018) était un diplomate français. Diplômé de l’ENA, il commença sa carrière diplomatique dans les années 1940, avant d'entrer en 1948 au sein de l’administration centrale du ministère des Affaires étrangères. Après avoir enseigné à l’École libre des sciences politiques de 1954 à 1957, il devint conseiller diplomatique du général de Gaulle entre 1959 et 1964. Il occupa ensuite divers postes diplomatiques, et fut notamment Secrétaire général de la Défense nationale (1964-1968), Ambassadeur de France à l’UNESCO (1970-1975) et Ambassadeur de France au Canada (1979-1981).
Olivier Berruyer : M. Maillard, vous avez été conseiller diplomatique du général de Gaulle pendant son premier mandat de Président de la République. Quelle était alors sa conception de l'Europe ?
Pierre Maillard : À l'époque, on reprochait souvent au général de Gaulle ses idées sur l’Europe, peut-être en raison du rejet, en 1954, de la Communauté Européenne de Défense (CED) ou de son souci permanent pour la destinée de la France. Pourtant, non seulement le Général a toujours eu la vive conscience de la solidarité qui unissait la France aux autres pays de l’Europe occidentale, mais, en outre, il n’avait jamais oublié tout ce que l’Europe et ses peuples avaient apporté au monde sur le plan de la pensée, de la science, de la culture ainsi que du droit. Cependant, ses vues étaient sensiblement différentes de celles de Jean Monnet et des autres milieux qui appelaient à la « construction des États-Unis d'Europe ».
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