Souvent interprétée par la droite comme un legs du socialisme, la bureaucratie française provient bien plus sûrement de l’héritage de la monarchie absolue et d’un capitalisme libéré des corsets qui l’entravaient à ses débuts.
La droite a depuis longtemps fait de la lutte contre la prépondérance bureaucratique l’un de ses chevaux de bataille électoraux. Pendant la dernière campagne présidentielle à nouveau, Valérie Pécresse martelait sa proposition de créer un « comité de la hache » tandis que Guillaume Pelletier, transfuge des Républicains vers Reconquête !, le parti d’Éric Zemmour, proclamait : « La France est trop socialiste à l’intérieur, trop libérale à l’extérieur ». Dans leurs esprits, la bureaucratie est le contraire absolu du libéralisme et du capitalisme, associés au laisser-faire/laissez-passer, à la libre entreprise et à la liberté individuelle des citoyens.
Le souvenir de l’expérience soviétique contribue d’autant plus à ce genre de représentation. La continuité établie entre la bureaucratie d’aujourd’hui et le communisme ou le socialisme d’hier est pourtant le meilleur moyen de manquer les causes profondes de ce que la droite critique avec plus ou moins de sincérité selon ses variantes : les excès de normes et de paperasse, les mille-feuilles administratifs et les décisions prises par des experts hors-sol. À l’évidence, la rose du Parti socialiste n’a cessé de pâlir depuis le « tournant de la rigueur » de 1983 et l’utopie communiste a été discréditée par la chute de l’URSS, qui, contrairement aux idées reçues, fut suivie d’une hausse de 25 % des fonctionnaires russes entre 1992 et 2002 d’après la Banque mondiale.
L’autre explication habituelle de la surcharge bureaucratique contient beaucoup plus de vérité. Elle blâme l’héritage administratif légué par la monarchie absolue à la Révolution française, au cours du XVIIIe siècle où naquit précisément le mot de « bureaucratie » sous la plume de l’économiste Vincent de Gournay, et à l’Empire. Elle permet d’expliquer certaines des différences entre le modèle français, marqué de longue date par la centralisation politique, et le modèle allemand, bien plus souple dans la mesure où les Länder disposent de davantage d’autonomie que les régions de l’autre côté du Rhin par rapport au pouvoir central.
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