« Nous ne pouvons juger du degré de civilisation d’une nation qu’en visitant ses prisons », estimait Dostoïevski. À nouveau condamnée début juillet par la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) en raison des traitements inhumains et dégradants imposés à trois détenus qui l’avaient saisie, la France affiche un taux de surpopulation carcérale de 118,7 %. Mais le projet de loi d’orientation et de programmation de la justice (LOPJ), adopté en juillet, ne propose aucune mesure d’ampleur pour faire évoluer la situation – la seule réponse du gouvernement consistant à promettre toujours plus de places de prison, dans une stratégie d’affichage politique qui a surtout prouvé, depuis plusieurs décennies, son inefficacité.
L a France affiche un taux de surpopulation carcérale de 118,7 %. C’est dans les maisons d’arrêt – où sont incarcérés les prévenus et les condamnés à de courtes peines – que les chiffres sont les plus significatifs : selon l’Observatoire international des prisons, le taux de surpopulation y atteint 145 %, dépassant même 200 % dans certains établissements. Au total, plus de 73 000 personnes sont incarcérées en France, pour une capacité opérationnelle de 60 000 places environ.
« À cause de la surpopulation carcérale, tout est contraint »
« Chaque fois que j’entre dans une prison, je pense avoir touché le fond, mais celui-ci se dérobe toujours sous nos pieds », déclarait devant la commission des lois du Sénat la Contrôleure Générale des Lieux de Privation de Liberté (CGLPL), Dominique Simonnot. Or, les conditions d’incarcération sont profondément liées à la suroccupation des prisons.
C’est d’abord la dignité des conditions de détention qui est en cause. En janvier 2023, 2 111 des 72 173 détenus français dormaient sur un matelas à même le sol. Les personnes incarcérées disposent souvent de moins d'un mètre carré d’espace vital dans leur cellule. Le tableau a déjà été dépeint depuis plusieurs années dans les rapports parlementaires, institutionnels ou associatifs : cellules infestées de punaises de lit, humidité et moisissures permanentes, températures étouffantes l’été, absence de séparation avec les sanitaires, etc.
Plus encore, la surpopulation carcérale limite les perspectives de réinsertion des détenus. « À cause de la surpopulation carcérale, personne n’a accès à rien, car tout est contraint par le temps », déplore Dominique Simmonot lors de son audition devant le Sénat. Dans l’un des établissements visités par la CGLPL, le temps maximum qu’un détenu peut passer hors de sa cellule est de moins de quatre heures – les trois quarts de ce temps n’étant consacrés qu’à la promenade. Dans son rapport d’activité 2022,la contrôleure note ainsi que seuls 25 % des détenus travaillent, contre 70 % en Allemagne, tandis que les possibilités d’accéder à l’enseignement sont souvent très réduites.
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