Pour l'ancien sous-directeur de la Banque de France, le passage en France d'une économie de reconstruction colbertiste à une économie réellement capitaliste à partir des années 1980, a eu de lourdes conséquences sur le rôle et l'impact des actionnaires sur l'économie. Dans cet entretien exclusif réalisé par Olivier Berruyer en 2012, Philippe Lagayette revient également sur les dangers des politiques monétaires laxistes qui, en maintenant des taux d'intérêt très bas, ont facilité un endettement massif ainsi qu'une explosion de la masse monétaire.
Philippe Lagayette (1943 -) est un ancien élève de l’ENA et de l’École Polytechnique. Il commence sa carrière dans la fonction publique à l’Inspection des Finances et poursuit au ministère de l’Économie, où il est nommé sous-directeur du Trésor en 1980. Il rejoindra ensuite le cabinet de Jacques Delors, alors ministre de l’Économie et des Finances, avant d’être nommé sous-gouverneur de la Banque de France en 1984, puis intègrera le secteur banquier en tant que directeur général de la Caisse des Dépôts puis Vice-Chairman de JP Morgan.
Olivier Berruyer : Depuis quelques dizaines d’années, le rôle des actionnaires dans les entreprises s’est renforcé. Historiquement, pendant les Trente Glorieuses, les actionnaires avaient peu de poids dans la gestion des entreprises, tandis qu’aujourd’hui, ils semblent presque omnipotents. Que pensez-vous de cette situation ?
Philippe Lagayette : Il faut d’abord noter que l’économie française, de 1945 à 1970, était une économie de reconstruction, dans laquelle dominaient les besoins d’organisation. Ainsi, les facteurs de production étaient présents, la main-d’œuvre était formée, les équipements existaient, etc. Tout cela résulte des efforts organisés par l’État « colbertiste » des années 1940-1970.
La question du capital importait peu, puisque le capital était public pour les grands efforts – sans compter la puissante croissance caractéristique de cette époque. Dans ces conditions, les actionnaires n’apportaient pas beaucoup d’argent. La planification occupait le premier rôle et la Bourse représentait peut-être seulement 10-11 % du total des investissements – c’était marginal.
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