La crise économique que nous traversons aujourd’hui remporte la palme de la plus profonde crise du capitalisme. Partie d’une crise financière, elle a ensuite muté en crise économique et sociale, et alimente désormais des crises politiques et géopolitiques. Michel Rocard, au cours d’un entretien inédit réalisé par Olivier Berruyer en 2012, nous donnait ses vues sur cette crise économique, et ses liens avec le monétarisme.

publié le 12/12/2021 Par Olivier Berruyer
Michel Rocard : « L’Europe est morte depuis le traité de Maastricht »

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Michel Rocard (1930-2016), homme politique français, est diplômé de Science Po et de l’ENA. Inspecteur des Finances de profession, il a été Ministre du Plan et de l’Aménagement du territoire (1981-1983), Ministre de l’Agriculture (1983-1985), Premier ministre (1988-1991) et Député européen (1994-2009).

Olivier Berruyer (Élucid) : Vous avez affirmé que la fin de Bretton Woods est une des causes de la crise. Quelle est votre vision du système monétaire international ? Que faudrait-il faire ?

Michel Rocard : Je ne pense pas, hélas, que les négociations intergouvernementales, et les conversations entre scientifiques ou connaisseurs sérieux soient suffisantes pour qu’on puisse réinventer un système monétaire. Keynes n’est plus là, personne n’a son autorité.

Par conséquent, le seul moyen est de sélectionner un paquet des grosses monnaies, d’essayer de réunifier leurs liens mutuels, et de reprendre par exemple les régulations qui étaient celles du système européen. Une solution possible serait d’élargir mondialement le Système monétaire européen créé en 1979 pour la stabilisation des monnaies européennes. Mais là, je parle en politique, en praticien qui fait avec ce qu’il a. J’écarte par impuissance toutes sortes d’inventions.

O. Berruyer : Et sur l’Euro ? Vous étiez là au moment des négociations avec l’Allemagne en 1981 : quelle est votre vision de son fonctionnement actuel ?

Michel Rocard : Sur des questions comme celle-ci, je suis aux limites de ma compétence : je ne suis pas un économiste. Cela étant, oui, absolument, j’étais là à l’époque de ces négociations — qui ont conduit à la libération finale des mouvements de capitaux. L’idée de la monnaie unique s’était répandue un peu partout, le Benelux en tête avec le rapport Werner, qui proposait un modèle en trois étapes pour établir l’union économique et monétaire. En France, comme en Allemagne, il a fallu se battre, ensemble, contre nos nationalismes. L’entente franco-allemande était profonde, mais avec une coloration peut-être un peu différente.

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