Certains écologistes l’ont claironné : difficile de sauver la planète, car la nature humaine est fondamentalement égoïste. D’autres prétendent que cet état de fait est typique de notre époque : la société actuelle favoriserait les individus centrés sur eux-mêmes. Pourtant, le postulat philosophique dépeignant l’être humain comme un prédateur pour lui-même ne date pas d’hier. En effet, au siècle des Lumières, de nombreux libres penseurs ont développé l’image d’une humanité qui ne songeait qu’à son propre profit. Or, depuis une trentaine d’années, certaines évidences scientifiques mettent en lumière un être humain prédisposé à la bienveillance. En effet, des travaux récents ont montré que l’altruisme est naturellement présent chez une majorité de bébés dès l’âge de 14 mois. Alors y aurait-il un terrain fertile à la coopération ? Que manque-t-il pour que la graine germe ?
« L’Homme est un loup pour l’Homme », soulignait le philosophe Thomas Hobbes au XVIIe siècle. Selon lui, l’être humain est motivé uniquement par la satisfaction de son intérêt privé – un concept que beaucoup ont depuis repris et qui perdure. Cette image que nous avons de notre propre espèce semble plus présente que jamais au vu du contexte politique et écologique. Mais cela transparait aussi dans notre vie quotidienne. On en a tous fait l’expérience, dans les lieux publics, les transports en commun, dans le milieu professionnel ; on a tous été témoins ou victimes des agissements typiques du « chacun pour soi ».
Ces comportements vont de la simple incivilité au fait de détourner le regard lorsqu’une personne est agressée. Ce nombrilisme apparent est-il un fait sociétal ou a-t-il toujours existé ? Sommes-nous, comme le pensait Hobbes, prêts à lutter contre autrui pour combler nos désirs ? Vaste sujet…
Les temps modernes
Dans l’Antiquité, Aristote définissait l’être humain comme un animal politique qui ne pouvait survivre sans tisser de liens sociaux. Les vertus d’entraide et de collaboration étaient plébiscitées. « C’est visible dans les ouvrages. L’Iliade par exemple, ce sont ceux qui laissent leur intérêt personnel de côté pour celui du groupe qui remportent la victoire », explique Julien Granata, professeur en management à Montpellier Business School.
C’est à l’époque des Lumières (XVIIIe siècle) que le paradigme de l’égoïsme universel chez l’être humain s’est développé. « Comme le souligne le sociologue Emile Durkheim, avant les Lumières, chacun était à sa place et personne ne l’a remettait en question. Les individus s’entraidaient par catégorie sociale », précise le Dr Bernard Ennuyer, sociologue et enseignant-chercheur à l’université Paris-Descartes.
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