La démocratie athénienne n’est pas ce qu’on en connaît. Christophe Pébarthe, maître de conférences en histoire grecque à l’université Bordeaux Montaigne, et qui a notamment fait publier Athènes, l’autre démocratie. Ve siècle av. J.-C. (Passés/Composés, 2022) et, avec Barbara Stiegler, Démocratie ! Manifeste (Le Bord de l’Eau, 2023), démythifie un certain nombre d’idées reçues qui entourent la démocratie à Athènes et invite, à partir de son exemple, à prendre au sérieux la possibilité d’un peuple se gouvernant effectivement lui-même.
Laurent Ottavi (Élucid) : On évoque généralement les femmes, les esclaves et les métèques lorsque l'on cherche à dénier l'effectivité de la démocratie athénienne. Qu'en était-il historiquement ?
Christophe Pébarthe : Cette évocation constitue le plus souvent la Sainte Trinité qui compose les « limites » de la démocratie athénienne. Au préalable, j'observe que, désormais, les remarques se concentrent sur les femmes et les esclaves. La situation qui est faite aux étrangers dans « nos » démocraties n'y est à l'évidence pas pour rien. Qu'en est-il des métèques à Athènes ? Comme l'étymologie l'indique, il s'agit d'étrangers qui disposent d'un statut de résident permanent (meta et oikein, vivre avec), à la condition de verser une somme annuelle. Pour donner un ordre de grandeur, le montant serait en France de 400 euros environ.
Sous cette condition, le métèque avait le droit de travailler et d'ester en justice. Il ne pouvait toutefois pas devenir propriétaire. Aussi longtemps qu'il le souhaitait, il résidait sans que personne ne puisse lui demander quoi que ce soit. Je laisse chacun comparer avec « l'accueil » que « nos » démocraties réservent à celles et ceux qui sont nommés « migrants ».
La critique de la démocratie athénienne se concentre donc aujourd'hui sur les femmes et les esclaves. Commençons par ces derniers et précisons si nécessaire que je condamne l'esclavage à toutes les époques. De ce point de vue, il faudrait avoir le courage de regarder la situation des étrangers qui arrivent par exemple en Italie du Sud, dont bon nombre ramassent nos fenouils et nos oranges dans des conditions qui font d'eux de véritables esclaves (cf. Gilles Reckinger, Oranges amères. Un nouveau visage de l'esclavage en Europe, Paris, Raisons d'agir, 2023).
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