Depuis les débuts de la première révolution industrielle en Angleterre, les sociétés occidentales ont nourri un rapport particulièrement ambigu au progrès technique. Il a été à la fois vu comme une menace terrible capable d’emporter la société dans des tourments nombreux, mais aussi comme la source d’un mieux-être collectif. En plus de deux siècles, il a été entendu à maintes reprises que « la machine remplace le travail humain ». L’avènement du progrès technique est ainsi vu par certains comme une menace pour l'emploi, et par d'autres comme une ère de libération des travaux jugés physiquement contraignants et laissant entrevoir des décennies de prospérité. Depuis les années 1990, avec l’avènement des nouvelles technologies de l’information puis avec le développement d’internet et de la téléphonie mobile, le débat revient sur le devant de la scène. Les attentes ont été nombreuses en termes d’emplois, de productivité. Désormais, c’est l’intelligence artificielle générative (IAG) qui préoccupe. D’autant que les premiers rapports sur l’impact de l’IAG sur l’emploi sont parfois alarmants.

Les révolutions industrielles s’articulent souvent à un ensemble d’innovations. Ces dernières lui donnent un visage et un certain dynamisme. Que l’on pense à la vapeur, à l’électricité, au machinisme de manière générale. Mais la présence prépondérante du progrès technique dans l’activité économique suscite souvent des craintes. La plus connue d’entre elles est celle de penser que la machine remplace l’homme. Dès le début du XIXe siècle, le mouvement Luddiste entre 1811 et 1816 en Angleterre, pétri d’une pareille crainte, engageait un mouvement dur de destruction des machines textiles.
Depuis, la peur de voir les emplois emportés par les transformations technologiques n’a eu de cesse de choisir de nouveaux objets. Pourtant, le progrès technique n'a pas toujours eu à plaider coupable. Plus d’emplois ont été créés que détruits, le temps de travail a été réduit, les gains de productivité ont enrichi aussi bien les entreprises, les individus que les États. L’économiste Jacques Freyssinet, dans son ouvrage Le Chômage (Paris, La Découverte, 1997) ne s’est pas trompé lorsqu’il a vu en lui un bouc émissaire idéal. En période de prospérité, il est célébré comme un ingrédient de la dynamique économique. En situation de ralentissement, il est désigné comme le responsable de bien des maux et de la reprise du chômage.
Les liens entre le progrès technique et l’emploi au cœur de « la destruction créatrice »
Les rapports entre l’emploi et le progrès technique sont donc délicats et font l’objet d’appréciations différenciées. Leurs articulations s’inscrivent dans la dynamique de « la destruction créatrice » énoncée par l’économiste austro-américain Joseph A. Schumpeter (Capitalisme, Socialisme et Démocratie, 1942). Ce double mouvement laisse entendre que des grappes d’innovations nombreuses viennent détruire des activités anciennes, puis ouvrent la voie au développement de nouveaux secteurs qui créeront de l’emploi.
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