« La Russie est climatosceptique », lit-on ou entend-on souvent. Mais de quoi parle-t-on ? Le climatoscepticisme, terme apparu au milieu des années 1990 sous la plume du journaliste américain Ross Gelbspan (1), désigne le déni ou la minimisation du changement climatique, la négation de son origine anthropique ou de la possibilité de le combattre. Depuis une quinzaine d’années, le phénomène fait l’objet de sondages réguliers, et nombre d’ouvrages explorent les mécanismes politiques, idéologiques et psychologiques qui en seraient responsables (2).
Le climatoscepticisme affecte inégalement différents groupes de population : dans la plupart des pays, les milieux conservateurs, de droite, y sont ainsi plus sensibles que les milieux de gauche ; les pays eux-mêmes peuvent être classés en fonction de la prévalence de ces opinions parmi leurs habitants. Ces dernières années, les enquêtes internationales enregistrent ainsi la progression du climatoscepticisme en France, dont 37 % des habitants nient ou minorent le phénomène du réchauffement climatique en 2022. Elles indiquent également, sans surprise, que les taux les plus forts se retrouvent dans les pays producteurs d’énergies fossiles : 60 % en Arabie Saoudite : 48 % en Norvège, en Russie et aux États-Unis, 46 % aux Émirats arabes unis.
Parmi ces pays, la Russie est présentée plus systématiquement que les autres comme climatosceptique. Outre son statut de producteur et exportateur majeur d’hydrocarbures, on met généralement en avant les déclarations provocatrices de ses dirigeants, notamment de Vladimir Poutine, ainsi que la propension de ce pays à traîner les pieds pour ratifier les accords internationaux visant à réduire les émissions, en particulier le protocole de Kyoto (1999, ratifié en 2004) et l’accord de Paris (2015, ratifié en 2019). Ses engagements relatifs à ces accords sont de surcroît très limités, puisque l’année de référence choisie, 1990, est antérieure à la récession économique des années 1990, et que la Russie profite de la possibilité de moduler la réduction des émissions en tenant compte de l’importante capacité d’absorption de CO2 de ses forêts. Au total, dans les médias de masse, la Russie apparaît comme un pays rustre, dont ni les élites ni la population ne sont réellement préoccupées par la crise écologique en cours.
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