Selon Paul Bairoch, l’économie, une science pourtant jeune, regorge déjà d’idées fausses et de paradoxes. Dans Mythes et paradoxes de l’histoire économique (1999), l’auteur s’efforce de déconstruire ces idées, dans une tentative d’analyse lucide de la discipline.

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L’Histoire sert bien souvent d’exemple pour légitimer les politiques économiques. Bairoch remet en question les mythes historiques qui ont justifié ces dernières. Il cible et tranche en plein cœur de la jungle des idées fausses, quelle que soit leur orientation idéologique, s’attaquant au libre-échange, à l’esclavage ou au protectionnisme.

Ce qu’il faut retenir :

L’histoire économique est utile pour remettre dans son contexte les évènements que l’on a pu mythifier et transformer. Il s’agit ici de détruire ces mythes qui voilent la réalité.

Le premier de ces mythes concerne le libéralisme. Si dans certains cas le libéralisme est bénéfique, au regard de l’histoire, cela est loin d’être une évidence. Le Royaume-Uni bénéficia d’une remarquable croissance après son tournant libéral en 1846, mais, il doit cette croissance à l’avance technologique acquise au fil de longs siècles de protectionnisme qui lui permit de dominer ses voisins et le monde.

Veillons également à ne pas confondre les phénomènes historiques récents avec d’autres, plus anciens, comme cela est fréquemment le cas avec l’histoire de la colonisation : la révolution industrielle ne fut pas permise par la colonisation ; les colonies ne servirent pas de débouchés aux Européens ; les pays développés ne furent pas dépendants des importations de matière première et d’énergie du tiers monde avant 1955.

En revanche, les pays du tiers monde sont victimes de mythes persistants : la croissance démographique menace leur croissance économique ; l’urbanisation galopante et l’existence de céréales bon marché détruisent leur productivité agricole ; l’exportation de produits primaires n’est pas une voie vers le sous-développement.

L’histoire économique est rude et parfois acerbe. Il est néanmoins plus que nécessaire que les économistes s’en inspirent sans idées reçues, afin d’éviter toutes constructions idéologiques qui n’existent que dans l’esprit et n’ont rien à voir avec la réalité.

Biographie de l’auteur

Paul Bairoch (1930-1999) était un historien économique suisse d’origine belge, spécialiste de la période de l’après-guerre, d’histoire urbaine et de démographie historique.

Professeur à l’Université libre de Bruxelles, professeur honoraire à l’université de Genève et conseiller du GATT de 1967 à 1969, il est notamment connu pour son approche critique des thèses économiques généralement admises concernant, entre autres, le libre-échange, le protectionnisme et la colonisation.

Avertissement : Ce document est une synthèse de l’ouvrage de référence susvisé, réalisé par les équipes d’Élucid ; il a vocation à retranscrire les grandes idées de cet ouvrage et n’a pas pour finalité de reproduire son contenu. Pour approfondir vos connaissances sur ce sujet, nous vous invitons à acheter l’ouvrage de référence chez votre libraire. La couverture, les images, le titre et autres informations relatives à l’ouvrage de référence susvisé restent la propriété de son éditeur.

Synthèse de l’ouvrage

Partie I. Les grands mythes concernant le monde développé

Le terme « mythe », dans cet ouvrage, renvoie à la vision erronée d’un évènement de l’histoire économique, rebattue par un grand nombre d’économistes, de spécialistes des sciences sociales ou par le grand public.

Chapitre 1. Le krach de 1929 et la grande dépression

La première de ces idées reçues a été créée pendant l’épisode du krach de 1929 et la grande dépression qui suivit. Trois mythes y sont généralement associés : le krach est la conséquence des mesures protectionnistes prises au cours des années vingt ; la dépression fut d’une ampleur cataclysmique ; et, les régimes fascistes y résistèrent bien mieux. Or, rien n’est plus faux.

Le premier mythe, selon lequel l’effondrement économique a été provoqué par un protectionnisme renforcé, trouve sa source dans une loi américaine renforçant les mesures tarifaires, votées en juin 1929 par le Sénat et la Chambre des Représentants. Cependant, cette loi, le Smooth Hawley Act, n’est signée par le Président Hoover que le 17 juin 1930, soit presque un an après le krach d’octobre 1929. L’application de ces mesures poussa près de vingt-cinq pays à augmenter également leurs droits de douane. En somme, le protectionnisme semble être plus une conséquence qu’une cause de la crise. En réalité, entre 1913 et 1927, la moyenne des droits de douane sur les produits manufacturés reste presque inchangée, passant de 24,6 % à 24,9 %. Puis, en 1928 et 1929, les droits de douane sont abaissés. Ainsi, la période précédant le krach n’est pas caractérisée par un accroissement du protectionnisme, mais, au contraire, par une légère tendance libérale.

En ce qui concerne le deuxième mythe, qui fait de la grande dépression le synonyme de chômage de masse et de récession, il est vrai que le chômage connût une certaine hausse dans le secteur industriel. Cependant, le taux de croissance annuel moyen du PNB par habitant des pays développés était de 1,1 % entre 1929 et 1939 contre 1,6 % entre 1913 et 1929 (en excluant les quatre années de guerre). En définitive, la situation est assez éloignée de l’image d’un système économique effondré véhiculée par ce deuxième mythe.

Enfin, s’agissant des performances des régimes fascistes, il faut reconnaître que l’Allemagne fasciste eut de meilleurs résultats dans les années 1930 : 4,2 % de hausse annuelle du PNB par habitant entre 1929 et 1938 ainsi qu’un taux de chômage tombant de 34,2 % en 1930 à seulement 11,8 % en 1938. Mais, ces résultats sont en grande partie dus au fonctionnement de la machine de guerre allemande, sans compter que son point de départ était plus bas que les autres pays développés, l’Allemagne ayant été plus durement touchée par la crise. Par ailleurs, l’Italie fasciste connait une croissance relativement faible de son PNB par habitant – seulement 0,7 % par an sur la même période, contre 1,1 % pour l’ensemble des pays développés. En outre, l’évolution de son taux de chômage, qui devient un outil de la propagande fasciste, est peu fiable.

Chapitre 2. « Le libre-échange est la règle, le protectionnisme l’exception. »

Parmi les dogmes de l’économie néo-classique, la maxime selon laquelle « le libre-échange est la règle, le protectionnisme l’exception » est particulièrement répandue. Ce mythe, très présent au sein du GATT, « temple du libre-échange », est un parfait travestissement de la vérité puisqu’il en est l’exact inverse.

La réalité historique montre que le libéralisme n’est qu’un îlot au sein d’un océan de protectionnisme. Aux XVIe et XVIIe siècles, l’âge d’or du mercantilisme, le protectionnisme est un principe, qui permet aux pays de dégager un excédent commercial et d’accumuler des métaux précieux, alors synonymes de richesse et de puissance.

Le libre-échange, comme théorie économique, trouve sa source dans l’ouvrage d’Adam Smith, La Richesse des nations (1776) et, spécialement, dans le traité de commerce franco-anglais de 1780, qui consacre le « laissez-faire » dans les échanges commerciaux entre les deux nations. Ce traité est abandonné avant la fin du siècle devant les importantes désillusions du libre-échange et les guerres européennes qui éclatent sur la période 1790-1815.

Après cette très courte parenthèse libre-échangiste, l’Europe connait un regain protectionniste avec la théorie du protectionnisme éducateur de l’allemand Friedrich List (1810). Selon cette théorie, seule une industrialisation à l’abri de la concurrence étrangère permet le développement d’un pays. Le libre-échange n’est pas écarté, mais doit être précédé d’une première période de protectionnisme.

Les politiques économiques libérales font leur retour en 1846, au Royaume-Uni, avec l’abolition des Corn Laws. Ces lois interdisaient l’importation de blé étranger à un prix trop bas par rapport aux prix intérieurs. Elles maintenaient de facto le coût de la vie, et donc des salaires, à un niveau relativement élevé, ce qui paralysait l’industrie manufacturière britannique.

En 1860, Napoléon III, en France, parvient à imposer un nouveau traité commercial franco-anglais en contournant le vote du Parlement français à majorité protectionniste. Pour les parlementaires, ce traité constituait un véritable coup d’État libéral. Après la France, le reste de l’Europe ne tarda pas à se convertir au libéralisme.

L’Allemagne est la première à reprendre une logique protectionniste, dès 1879, pour la mise en œuvre de la Realpolitik de Bismarck. Le reste de l’Europe, par ailleurs, était loin d’être majoritairement libéral. Les propriétaires agraires français, par exemple, se sont alliés aux industriels protectionnistes et, ensemble, finissent par avoir raison du libéralisme en faisant adopter le tarif protectionniste de Méline (1892). Aux États-Unis et au Canada également, les années 1870 sont marquées par un certain protectionnisme, ce qui a pour conséquence directe, une baisse des exportations britanniques. C’est dans ce contexte qu’est créé le parti protectionniste britannique de la Tarif Reforme League (Ligue pour la réforme tarifaire) de Joseph Chamberlain, qui réclame une limitation des exportations britanniques au Commonwealth. Le Parti libéral s’oppose à eux et, à la faveur d’un regain de croissance en 1905, remporte les élections de 1906. Le libre-échange ne sera abandonné au Royaume-Uni qu’en 1932.

En définitive, l’histoire économique est formelle : « le libre-échange est l’exception et le protectionnisme la règle. »

Chapitre 3. Les États-Unis, temple du libéralisme

L’histoire remet également en question l’idée selon laquelle les États-Unis seraient un pays de tradition libérale. Au contraire, les États-Unis sont « la patrie et le bastion du protectionnisme moderne ». Alexander Hamilton, ministre des Finances du premier gouvernement américain, est d’ailleurs l’auteur du tout premier texte exposant la théorie du protectionnisme moderne et l’idée « d’industrie dans l’enfance » en 1791, vingt ans avant List.

Dès 1816, la quasi-totalité des produits manufacturés est soumise à un droit de douane fixé à environ 35 %. Malgré la forte opposition entre le Nord protectionniste, en pleine phase d’industrialisation, et le Sud libéral, car exportateur de biens agricoles (tabac, coton), le parti protectionniste l’emporte en 1829. Les droits de douane atteignent alors 50 % et montent jusqu’à 60 % pour certains produits agricoles. La guerre de Sécession de 1860, entre le Nord et le Sud, qui se conclut sur la victoire des États protectionnistes du Nord, ne remettra pas en question cette politique.

Chapitre 4. Le protectionnisme est toujours négatif

Un des mythes les plus tenaces propage l’idée que le libre-échange favoriserait le développement alors que le protectionnisme ne ferait que le retarder. L’origine de ce mythe tient au fort niveau de croissance corrélé à la hausse du commerce extérieur du Royaume-Uni à partir de l’abolition des Corn Laws en 1846. En effet, entre 1846 et 1860, le PNB par habitant a augmenté de 2,2 % par an et les exportations de 6 % par an. La première expérience du libéralisme fut donc positive. Cependant, la situation est plus complexe.

En 1846, le Royaume-Uni, berceau de la révolution industrielle, se trouve dans une situation particulière : son industrie existe depuis déjà un siècle, soit depuis deux fois plus longtemps que toutes les industries d’Europe continentale. Le pays possède alors un fort avantage technologique, avantage d’ailleurs acquis grâce à de fortes barrières tarifaires sur une longue période.

En Europe continentale, en revanche, la mise en place du libre-échange à partir de 1860 provoque une baisse du prix des céréales à la suite de l’importation massive de produits agricoles bon marché – ce qui provoqua une stagnation voire une baisse du niveau de vie des paysans. Or, la population active du continent est alors composée à 63 % de paysans et 20 % d’ouvriers dans l’industrie ; tandis qu’au Royaume-Uni, 22 % sont paysans et 37 % travaillent dans le secteur industriel. Il aurait, en conséquence, fallu protéger les économies continentales et effectuer un transfert de main-d’œuvre de l’un à l’autre secteur avant de les ouvrir au libre-échange.

La reprise des politiques protectionnistes à partir de 1870-80 permet une amélioration. En effet, la première décennie qui suit est douloureuse, mais la seconde voit apparaitre un regain de croissance puis une hausse des exportations. Autrement dit, « la croissance économique est donc le moteur du commerce, pas l’inverse. »

Dans les colonies, les conséquences du libéralisme ont été tout aussi désastreuses. Les colonisateurs leur avaient en effet imposé le libre-échange sans tenir compte du retard important de développement de ces pays. Par exemple, la productivité d’un ouvrier anglais utilisant une machine à filer était 14 fois supérieure à celle d’un Indien utilisant des techniques traditionnelles de filage. Or, le salaire de l’ouvrier anglais n’est que deux à trois fois supérieur à celui de l’ouvrier indien. Les produits indiens sont ainsi bien plus onéreux que les exportations anglaises. Du fait du trop grand écart de rentabilité, l’Inde se trouve dans l’impossibilité de financer sa propre industrialisation.

Partie II. Les grands mythes sur le rôle du tiers monde dans le développement occidental

Chapitre 5. Les matières premières du tiers monde furent indispensables à l’industrialisation occidentale ?

L’idée selon laquelle les matières premières en provenance du tiers monde participèrent à l’industrialisation de l’Occident, contient certes une part de vérité. Mais, il est nécessaire de recontextualiser historiquement les faits. Il est vrai qu’en 1973, les pays d’Europe occidentale tirent 58 % de leur énergie commerciale des pays du tiers monde et peuvent parfois y trouver jusqu’à 90 % de leurs approvisionnements en métaux. Cependant, jusqu’à la veille de la Première Guerre mondiale, « 98 % des minerais métalliques utilisés dans les pays développés venaient du monde développé ; le chiffre était de 80 % pour les fibres textiles et […] de 100 % pour l’énergie. »

Au XIXe siècle, le monde développé n’est donc pas dépendant du tiers monde sauf des produits inexistants ou quasi inexistants sur son sol à l’instar du caoutchouc, du cuivre, des phosphates, etc. Il faut également ajouter que, du point de vue du tiers monde, 90 % des exportations de ces pays sont des produits primaires et que 100 % de ces exportations sont à destination des pays développés, ce qui contribua à alimenter le mythe.

Chapitre 6. Sans les débouchés coloniaux, pas de développement des industries occidentales ni de croissance pour les pays colonisateurs.

À nouveau, l’absence de contextualisation a conduit certains à croire que le développement des industries occidentales dépendait des débouchés coloniaux. Ce mythe est essentiellement issu du constat, par les pays colonisés, que la quasi-totalité des produits manufacturés consommés par les pays du tiers monde provenait des pays colonisateurs. En réalité, hormis pour le Royaume-Uni, les marchés coloniaux n’étaient pas indispensables à la croissance occidentale. Entre 1800 et 1938, seulement 9 % des exportations européennes sont à destination des colonies. Mais, ce mythe a la peau dure, car 40 % des exportations du Royaume-Uni sont à destination de ses colonies, chiffre souvent cité par les ouvrages marxistes.

« En comparant les taux de croissance pour le XIXe siècle, il apparait qu’en règle générale les pays non coloniaux ont connu un développement économique plus rapide que les pays coloniaux. » La cause de ce phénomène tient au fait que la facilité d’accès des marchés coloniaux n’encourageait pas la production de biens nouveaux ni l’innovation technologique et « qu’une grande partie de l’esprit d’entreprise et du dynamisme en général ait été détournée de l’économie nationale pour s’investir dans l’aventure coloniale. »

Chapitre 7. Le bilan du colonialisme

« Si l’Occident n’a guère gagné au colonialisme, cela ne signifie pas que le tiers monde n’y ait pas beaucoup perdu. » Le bilan est catastrophique. La colonisation a laissé des marques, au point que « dans certaines zones du tiers monde, le niveau de vie était en 1950 inférieur à celui de 1800. »

Les pays colonisés subirent, entre autres, une désindustrialisation massive, une réservation des meilleures terres agricoles pour l’exportation, provoquant une chute de la production vivrière, une explosion démographique incontrôlée et une perte de leur indépendance nationale – sans oublier la traite des Noirs (11 millions de personnes) et la dégradation de nombreuses formes de civilisations.

Il faut cependant noter que l’Occident ne fut pas l’unique colonisateur. Égyptien, romain, perse ou chinois, de nombreux empires se sont succédé dans l’histoire et pratiquaient l’esclavage à grande échelle. En ce qui concerne la traite des Noirs, le monde musulman a été ainsi à l’origine de la vente, en tant qu’esclaves, de près de 25 millions de personnes.

On peut, paradoxalement, trouver un point positif à la colonisation. Si la condition de réalisation de la Révolution industrielle et du développement de l’Occident était la colonisation, cela signifierait que le développement du tiers monde serait impossible. Or, l’expérience de l’Occident montre que le processus de développement est possible sans exploitation d’autres régions. Cela ne signifie pas que le développement des anciennes colonies serait facile, mais il est, en tout cas, possible.

En somme, « l’Occident n’avait pas besoin du tiers monde, ce qui est une bonne nouvelle pour le tiers monde. »

Partie III. Les grands mythes concernant le tiers monde

Chapitre 8. Les pays du tiers monde étaient déjà moins développés avant la révolution industrielle

Une croyance répandue est celle de l’ancienneté de l’écart de développement entre les pays du tiers monde et les pays colonisateurs. En réalité, les écarts de revenus entre les grandes régions du monde se situaient dans un rapport de 1 à 1,1-1,3 entre les futurs pays développés et le futur tiers monde, sur la période 1700-1750. L’Europe était loin d’être le seul îlot de richesses et les nombreux témoignages oculaires de voyageurs, marchands et conquistadores qui nous sont parvenus confirment l’immense richesse de certaines régions du monde (Chine, Moyen et Extrême-Orient et civilisations précolombiennes). Les sociétés traditionnelles, européennes ou non, étaient bien différentes de l’image que l’on a tendance à s’en faire de nos jours et étaient relativement urbanisées.

Le tiers monde n’est donc pas soumis à la fatalité : les pays sous-développés ne sont pas condamnés à le rester, les pays occidentaux n’ayant pas bénéficié d’une situation de départ beaucoup plus favorable.

Chapitre 9. Les pays colonisés ont subi une importante détérioration des termes de l’échange.

L’idée selon laquelle les termes de l’échange ont été défavorables aux pays colonisés repose en réalité sur une erreur d’appréciation de la SDN, qui a généralisé le cas du Royaume-Uni, du sucre et des échanges des années 1850, à l’ensemble des États coloniaux. Les recherches menées dans les années 1960-70 montrent que « entre les années 1870 et la période 1926-1929, les termes de l’échange des produits primaires par rapport aux produits manufacturés se sont améliorés de 10 % à 25 %, au lieu de se détériorer d’environ 20 % selon les calculs de la SDN. »

Il est cependant vrai qu’ils se sont détériorés depuis les années 1950, ce qui correspond paradoxalement à la période de la décolonisation. À cette époque, « les grandes entreprises acheteuses ont pu imposer des baisses de prix puisque les problèmes locaux ne concernaient plus directement l’ancienne métropole développée. »

Par ailleurs, il est vrai que, puisque les cultures d’exportations étaient plus rentables, les pays du tiers monde ont tendance à abandonner les cultures vivrières pour préférer les importations de produits alimentaires en provenance des pays développés. Mais, l’explication de ce phénomène tient surtout au fait que les considérables gains de productivité de l’agriculture des pays développés ont baissé le coût de production des produits agricoles pour ces derniers. Ainsi, le prix des produits agricoles des pays développés a atteint un niveau plus faible que celui des produits agricoles du tiers monde, rendant plus avantageuse l’importation que la production.

Chapitre 10. La démographie est la clé de la croissance

Le mythe de la démographie comme source de croissance provient d’une alliance contre nature entre les dogmes idéologiques marxistes et religieux qui s’opposent au contrôle des naissances. Selon ces idées, la croissance des pays développés tient au doublement de sa population entre 1810 et 1910. Mais, cette hausse démographique s’est étalée sur un siècle alors que les pays du tiers monde connaissent une hausse annuelle de leur population de 2,4 % en moyenne, soit un doublement de leur population tous les trente ans.

Cette évolution trop rapide a des effets néfastes : une population active supérieure aux capacités d’emplois industriels, la nécessité d’investissements publics importants, une explosion urbaine et une réduction de l’espace.

« L’autre argument avancé à l’encontre de l’organisation d’un planning familial est l’affirmation que le contrôle des naissances bouleverse les valeurs traditionnelles et l’évolution “naturelle” des populations. En réalité, c’est avant tout le déclin de la mortalité infantile grâce à la technologie moderne qui bouleverse ces valeurs et cette évolution, le contrôle des naissances n’est de ce point de vue qu’une mesure de correction. »

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