Anne Hidalgo et l’Afghanistan : la géopolitique des sentiments

Le 16 août dernier, la maire de Paris a lancé un appel au soutien de la « résistance » aux Talibans, incarnée selon elle par Ahmad Massoud. Une posture morale grisante, mais qui tourne à vide.

publié le 12/10/2021 Par Éric Juillot

Les fenêtres des bureaux de la mairie de Paris seraient-elles trop petites ? C’est ce que laisse penser la prose dont Mme Hidalgo a gratifié récemment les lecteurs du Monde à propos de la crise afghane. La future candidate à l’élection présidentielle a publié dans les colonnes de ce journal un texte censé démontrer l’acuité de ses vues et la fermeté de son jugement sur les questions internationales.

L’exercice, raté, a cependant le mérite de mettre à nu les fondements et les présupposés de ce qu’il faut bien appeler un néo-conservatisme à la française expirant — tout comme son équivalent américain — mais que Mme Hidalgo, sollicitée par Bernard Henri-Lévy, se fait fort de défendre une dernière fois, ingénument peut-être.

Son texte constitue en effet un catalogue de tous les vices d’analyse, les défauts d’approche et les distorsions du réel propres au néo-conservatisme et qui ont abouti au désastre afghan.

Le propos souffre d’abord d’un biais sentimentaliste d’autant plus problématique qu’il est parfaitement assumé. Mme Hidalgo rappelle ainsi qu’elle a été élevée par un décret présidentiel afghan dans l’ordre du « héros national d’Afghanistan Commandant Massoud », qu’elle s’en est trouvée « émue et honorée », qu’un « lien profond » la lie de ce fait à ce pays, lien qui la détermine à prendre la parole.

Elle s’étend par ailleurs longuement sur le sort qui attend les femmes et les hommes afghans voués à être engloutis dans « l’obscurité d’un régime fanatique », d’un « régime de terreur », imposé par des « talibans avides de vengeance ». Aucune de ces affirmations ne sauraient laisser indifférent, mais si, même en matière géostratégique, les sentiments peuvent compter dans les déterminants de l’action, ils ne sauraient à eux seuls façonner une politique, sauf à provoquer des catastrophes comparables précisément à celle que l’Afghanistan représente aujourd’hui.

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