Dans le flot de propagande anti-fonctionnaires auquel nous sommes continuellement soumis se trouve l’idée que la France serait rempli d’agents publics qui, de leur propre initiative et pour le plaisir, s’amuseraient à définir des normes en tous genres pour compliquer la vie de tout un chacun. Si de nombreux problèmes bureaucratiques existent bien, ils trouvent leur source chez le politique et dans l’idéologie du marché, et non chez les fonctionnaires qui les subissent bien plus qu’ils ne les décident.

Un refrain du discours politique consiste à déplorer un pays qui serait rempli de fonctionnaires administratifs n’ayant d’autre but dans la vie que de compliquer la vie des gens ordinaires. Si l’idée que nous sommes étouffés par les formulaires et les règles rencontre un certain nombre d’échos dans notre vécu, les causes de cet état de fait sont très rarement identifiées ou simplement judicieusement recherchées (1).
Le terme de « suradministration » laisse entendre que tout ce phénomène mal identifié est entièrement de la faute de l’administration, de fonctionnaires trop tatillons obsédés par les détails, comme la mesure au millimètre près de la taille des carottes, et exigeant trente-six formulaires à remplir pour justifier d’une carotte non conforme.
Or, ce terme est un leurre, puisque les racines de ce phénomène sont bien ailleurs. Ce n’est pas dans la psychologie des fonctionnaires qu’il faut chercher, mais dans des décisions, présentes et passées, prises au niveau politique. Il se trouve ainsi trois grands types de causes :
1) l’augmentation effrénée des missions des fonctionnaires par la loi sous l’effet d’une inflation législative ;
2) une réorganisation du secteur public en prenant pour modèle le privé ;
3) l’impuissance grandissante de l’administration organisée au nom de la mise en concurrence.
Un fonctionnaire ne fait qu’appliquer la loi
C’est un principe fondamental qui différencie le secteur privé du secteur public : tout ce qui existe dans le public, chacune des missions qui occupe les fonctionnaires, tout cela a été décidé par une loi votée dans un parlement, national ou européen. Parfois, la loi prévoit que les conditions d’application de ladite loi seront précisées par des textes subsidiaires (décrets, arrêtés, circulaires), pris par les ministres ou leurs subordonnés à qui le parlement a délégué expressément cette mission ; mais dans l’ensemble, il y a un texte législatif ou réglementaire en vigueur qui dicte l’action de chacun des agents publics. C’est en vertu de ce corpus de textes qu’un fonctionnaire est en capacité d’exiger d’un particulier ou d’une structure qu’il agisse comme il le lui ordonne.
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