Le singulier concept de la « tyrannie de la majorité » élaboré au début des années 2010 par la mouvance thaïlandaise ultra-royaliste des Chemises jaunes est aujourd’hui battu en brèche par des électeurs qui entendent porter au pouvoir le candidat de leur choix. Officiellement, les élites monarchistes n'ont rien contre la démocratie, mais leur discours prétend que le peuple n'est « pas encore prêt » pour cela ; il lui « manquerait » encore trop d'éducation et de discernement... Les royalistes considèrent le peuple comme une masse d'éternels crédules manipulés par de « vils populistes » tels Thaksin Shinawatra hier et Pita Limjaroenrat aujourd’hui , de « dangereux » opposants à l'ordre établi que l'armée et les institutions sont à même de neutraliser.

publié le 01/08/2023 Par Jack Thompson

BANGKOK. Ce 12 mai 2023, les principaux partis politiques en lice pour les législatives battaient le rappel du ban et de l’arrière-ban de leurs troupes. Les pick-up pavoisés aux couleurs des partis sillonnaient les rues de la Cité des anges. À l’avant-veille du scrutin, impossible d’échapper aux ribambelles de posters et placards électoraux qui envahissaient les trottoirs de la capitale thaïlandaise. Le soir-même, les ultimes joutes électorales de la campagne avaient lieu avant les législatives du 14 mai.

Principale tête d’affiche, le parti Pheu Thaï (Pour les Thaïs), dernier avatar en date du Tak rak Thaï (Les Thaïs aiment les Thaïs), le parti de l’ex-Premier ministre Thaksin Shinawatra renversé en 2006. Mi-mars, l'institut NIDA Poll créditait le Pheu Thaï – mené par la fille de Thaksin, Paetongtarn (36 ans) – de 50 % d’intentions de vote. Sachant que le clan des Shinawatra n’a jamais perdu une élection depuis 2001, et que le plus proche rival était largué avec seulement 17 % d’intention de vote, l’affaire était déjà dans le sac. Du moins, le croyait-on. Selon toute apparence, Paetongtarn était en route vers une victoire écrasante. Optimiste, le Pheu Thai pensait pouvoir obtenir a minima 310 sièges sur les 500 en jeu.

Affiches électorales, élections législatives, Bangkok, mai 2023 - @JackThompson

Depuis son exil doré à Dubaï, Thaksin se réjouissait à l’avance. Quitte à passer par la case prison — histoire de flatter son ego en subissant très brièvement le sort d’Aung San Suu Kyi ? —, il serait bientôt de retour au pays. En attendant, le milliardaire allait de ses petites phrases assassines. En 2011, sa sœur, Yingluck Shinawatra, alors en campagne pour le poste de Premier ministre, avait adopté pour slogan « Thaksin pense, le Pheu Thaï agit ». Aujourd’hui, selon l’ex-Premier ministre déchu, « l’ADN de Thaksin pense, l’ADN de Thaksin agit ». Rien que ça…

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