Les maux à l’origine de la détérioration de l’hôpital public perdurent quatre ans après le début du Covid. Sabrina Ali Benali, qui avait interpellé, dans une vidéo parue en 2017, la ministre de la Santé quand elle était interne dans un service d’urgence, et qui avait fait paraître un an plus tard La révolte d’une interne (Le Cherche-Midi, 2018), militante par ailleurs au sein de la France Insoumise, explique comment et pourquoi l’hôpital est détourné de ses missions initiales et décrit les conséquences sur les soignants et les patients.

publié le 02/06/2024 Par Laurent Ottavi

Laurent Ottavi (Élucid) : Pouvez-vous rappeler les raisons qui vous avaient poussées à enregistrer la vidéo de 2017, vue par des millions de personnes ? Constatez-vous, depuis, une prise de conscience et des actes allant dans le bon sens de la part des dirigeants au sujet de l’hôpital ?

Sabrina Ali Benali : Je rentrais d’une garde de nuit aux Urgences particulièrement éprouvante quand j’ai vu la Une du journal sur lequel je lisais : « Grippe, l’état d’urgence à l’hôpital de Mme Tourraine ». C’était lunaire. Toute la nuit, nous avions dû faire face à de multiples difficultés pour prendre en charge nos patients. Comme trop souvent. J’avais appelé 11 hôpitaux pour trouver une place en soins intensifs à une patiente avec une insuffisance cardiaque, fait face à une réanimation en urgence avec des soignants vacataires qui ne connaissaient rien du patient… etc. C’est tous les jours qu’on vit l’état d’urgence à l’hôpital et la ministre qui faisait son plan de com’ au prétexte de l’afflux de patients porteurs de virus grippaux, c’était trop. J’ai pris ma caméra pour lui raconter ma garde. La vraie vie. Pas celle des plateaux télé et des cabinets dorés.

Avec 12 millions de vues et des centaines de milliers de commentaires racontant la même chose partout en France, le constat était largement partagé. Les mobilisations du collectif inter-urgences, CIH, syndicats, collectifs citoyens et le Covid n’ont rien changé au paradigme des politiques qui nous dirigent. Il ne s’agit pas de problème de prise de conscience. Les dirigeants ont fait les grandes écoles, savent lire les chiffres, les rapports et nous n’avons eu de cesse de les alerter. Ils savent.

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