Les relations que les youtubeurs entretiennent avec leur audience sont d’une nature très particulière.  Il n’est pas rare que les personnes qui les suivent développent un sentiment de proximité et de familiarité avec ces figures publiques qu’elles ne connaissent pas véritablement. Le phénomène est connu sous le nom de « relation parasociale », et il arrive que les youtubeurs eux-mêmes s’expriment sur le sujet. Malheureusement, le discours qu’ils tiennent sur cette réalité qui les concerne intimement est souvent partiel et manque les enjeux de pouvoir qui sont au cœur de ses relations. Analyse.

publié le 30/12/2024 Par Grégoire Simpson

« Je ne suis pas ton ami ».  C’est le titre qu’a choisi le youtubeur Cyrus North au moment de publier sa vidéo en 2021. Un choix de titre volontairement abrupt qu’il s’empresse d’adoucir en nous adressant d’emblée des excuses, qui nous font bien sentir son tiraillement. On comprend alors qu’il ne veut pas nous blesser, mais qu’en même temps il se doit d’être « honnête » avec nous, car comme il nous le dira plus tard : « dans une relation c’est important de se dire les choses ». Et ces choses – coïncidence pédagogique incroyable –, il se trouve qu’elles ont été théorisées dans les années 1950 par deux Américains, Donald Horton et Richard Wohl, sous le nom de relations parasociales.

Quand les youtubeurs dévoilent l’illusion parasociale

À l’époque de la rédaction de leur article, nos deux chercheurs n’ont pas de youtubeurs sous la main, mais constatent déjà que certaines émissions (et aussi certains films) produisent un effet étrange sur leur audience. Elles créent chez elles et chez eux un sentiment d’intimité, elles leur donnent l’impression d’entretenir une relation de « face-à-face » avec leurs stars préférées.

Cette intimité est d’une nature très particulière, puisqu’elle se fait non seulement à distance – ce qui complique un peu les choses –, mais aussi avec des personnes que ces gens apprécient sans que celles-ci ne les connaissent ni ne les aiment en retour – ce qui complique beaucoup les choses. Il y a donc dans ses relations une asymétrie fondamentale, et c’est pour cette raison qu’Horton et Wohl nous expliquent qu’il n’y a là en réalité qu’une « illusion d’intimité ».

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