La guerre, c'est du business. Mais le génocide aussi. Le dernier rapport présenté par Francesca Albanese, rapporteuse spéciale sur les territoires palestiniens occupés, énumère 48 entreprises et institutions, dont Palantir Technologies Inc, Lockheed Martin, Alphabet Inc, Amazon, International Business Machine Corporation (IBM), Caterpillar Inc, Microsoft Corporation et le Massachusetts Institute of Technology (MIT), ainsi que des banques et des sociétés financières telles que Blackrock, des assureurs, des sociétés immobilières et des organisations caritatives, qui, en violation du droit international, gagnent des milliards grâce à l'occupation de la Palestine et au génocide des Palestiniens. Le rapport, qui comprend une base de données de plus de 1 000 entreprises qui collaborent avec Israël, exige que ces entreprises et institutions rompent leurs liens avec Israël ou soient reconnues coupables de complicité de crimes de guerre. « La “perpétuelle occupation” par Israël » y est décrite comme « le champ d'expérimentation idéal pour les fabricants d'armes et les Big Tech, qui fournissent une importante production et une forte demande, avec peu de contrôle et aucune obligation de rendre des comptes, tandis que les investisseurs et les institutions privées et publiques en tirent librement profit ».

Article Démocratie
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publié le 28/07/2025 Par Chris Hedges
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Lorsque l'histoire du génocide à Gaza sera écrite, l'une des championnes les plus courageuses et les plus véhémentes de la justice et du respect du droit international sera Francesca Albanese, la rapporteuse spéciale des Nations unies, que l'administration Trump a décidé de sanctionner pour ses prises de position et révélations. Son bureau est chargé de surveiller et de rendre compte des violations des droits humains commises par Israël à l'encontre des Palestiniens.

Francesca Albanese, qui reçoit régulièrement des menaces de mort et subit des campagnes de diffamation savamment orchestrées par Israël et ses alliés, s'efforce vaillamment de demander des comptes à ceux qui soutiennent et entretiennent le génocide en Palestine occupée. Elle fustige ce qu'elle appelle « la corruption morale et politique du monde » qui permet au génocide de se poursuivre. Son bureau a publié des rapports détaillés sur les crimes de guerre commis à Gaza et en Cisjordanie, dont l'un, intitulé « Le génocide, processus colonial d'éradication », a été reproduit en annexe de mon dernier livre, « A Genocide Foretold ».

Albanese a informé les organisations non étatiques qu'elles étaient « pénalement responsables » d'avoir aidé Israël à perpétrer le génocide à Gaza. Elle a annoncé que s’il était vrai, comme cela a été rapporté, que l'ancien Premier ministre britannique David Cameron avait menacé de se retirer de la Cour pénale internationale (CPI) et d'en supprimer le financement après qu'elle ait émis des mandats d'arrêt contre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou et l'ancien ministre de la Défense Yoav Gallant, Cameron et l'autre ancien Premier ministre britannique Rishi Sunak pourraient être inculpés pour infraction pénale en vertu du Statut de Rome. Celui-ci criminalise ceux qui tentent de faire obstacle à la procédure pénale visant des crimes de guerre.

Elle a appelé les hauts fonctionnaires de l'Union européenne à répondre des accusations de complicité de crimes de guerre pour leur soutien au génocide, affirmant que leurs actions ne pouvaient rester impunies. Elle a défendu la flottille Madleen qui cherchait à briser le blocus de Gaza et à acheminer de l'aide humanitaire, écrivant que le bateau, qui a été intercepté par Israël, ne transportait pas seulement des vivres, mais aussi un message d'humanité.

Son tout dernier rapport liste 48 entreprises et institutions, dont Palantir Technologies Inc, Lockheed Martin, Alphabet Inc (Google), Amazon, International Business Machine Corporation (IBM), Caterpillar Inc, Microsoft Corporation et Massachusetts Institute of Technology (MIT), ainsi que des banques et des sociétés financières telles que BlackRock, des assureurs, des sociétés immobilières et des organisations caritatives, qui, en violation du droit international, gagnent des milliards grâce à l'occupation de Gaza et au génocide des Palestiniens.

Le secrétaire d'État Marco Rubio a condamné le fait qu'elle soutienne la CPI, dont quatre des juges ont été sanctionnés par les États-Unis pour avoir délivré des mandats d'arrêt contre Netanyahou et Gallant l'année dernière. Rubio a critiqué Albanese pour l'action qu'elle a initiée afin de poursuivre les ressortissants américains ou israéliens qui soutiennent le génocide, en déclarant qu'elle n'avait pas les capacités requises pour agir en tant que rapporteuse spéciale. Il a également accusé Albanese d'avoir « dégueulé un antisémitisme non dissimulé, exprimé son soutien au terrorisme et d'avoir ouvertement méprisé les États-Unis, Israël et l'Occident ». Les sanctions de l'administration Trump empêcheront très probablement Albanese de se rendre aux États-Unis et gèleront tous les avoirs qu'elle pourrait détenir dans le pays.

L'attaque contre Francesca Albanese laisse présager un monde sans règles, un monde où les États voyous, tels que les États-Unis et Israël, sont autorisés à commettre des crimes de guerre et des génocides sans avoir à rendre de comptes ni à faire preuve de retenue. Elle met en évidence les subterfuges que nous utilisons pour nous leurrer nous-mêmes et tenter de leurrer les autres. Elle révèle notre hypocrisie, notre cruauté et notre racisme. Désormais, personne ne prendra au sérieux nos engagements déclarés en faveur de la démocratie, de la liberté d'expression, de l'État de droit ou des droits humains. Et qui peut en blâmer ces gens ? Nous parlons exclusivement le langage de la force, le langage des brutes, le langage du massacre, le langage du génocide.

« Les meurtres, les massacres, les tortures psychologiques et physiques, la dévastation, la création de conditions de vie qui ne permettent pas à la population de Gaza de vivre, la destruction des hôpitaux, les déplacements forcés et la privation d'abris, alors que les gens sont bombardés quotidiennement, et la famine – comment pouvons-nous évaluer ces actes de manière isolée ? », a demandé Albanese lors d'un entretien que j'ai eu avec elle et au cours duquel nous avons discuté de son rapport intitulé « Le génocide, processus colonial d'éradication ».

Les procès des industriels après l'Holocauste ainsi que la Commission sud-africaine pour la vérité et la réconciliation ont établi le cadre juridique de la reconnaissance de la responsabilité pénale des institutions et des entreprises qui participent à des crimes internationaux. Ce nouveau rapport indique clairement que les décisions prises par la Cour internationale de justice obligent les entités « à ne pas s'engager et/ou à se retirer totalement et inconditionnellement de toute relation associée, et à veiller à ce que tout engagement avec les Palestiniens permette leur autodétermination ».

« Si le génocide à Gaza ne s'arrête pas, c'est tout simplement parce qu'il est lucratif, qu'il est rentable pour beaucoup trop de gens », m'a dit Albanese :

« C'est un business. Depuis des décennies, des entreprises, y compris des États favorables à la Palestine, font des affaires et tirent des profits de cette économie d'occupation. Israël exploite depuis toujours les terres, les ressources et la vie des Palestiniens. Les profits se sont poursuivis et se sont même accrus au fur et à mesure que l'économie de l'occupation se transformait en une économie de génocide. »

De plus, selon elle, les Palestiniens ont offert « des terrains d'entraînement illimités pour tester les technologies, les armes et les techniques de surveillance qui sont aujourd'hui utilisées contre des personnes partout dans le monde, depuis le Sud global jusqu'au Nord global ».

Le rapport d'Albanese fustige les entreprises qui ont « fourni à Israël les armes et équipements nécessaires pour détruire les maisons, les écoles, les hôpitaux, les lieux de loisirs et de culte, les moyens de subsistance et les actifs productifs, tels que les oliveraies et les vergers ».

Le territoire palestinien est décrit comme un « marché captif », en raison des restrictions imposées par Israël au commerce et à l'investissement, à la plantation d'arbres, à la pêche et à l'approvisionnement en eau des colonies. Les entreprises ont profité de ce « marché captif » en « exploitant la main-d'œuvre et les ressources palestiniennes, en dégradant et en détournant les ressources naturelles, en construisant des colonies et en les alimentant en énergie, et en vendant et en commercialisant des biens et des services dérivés en Israël, dans le territoire palestinien occupé et dans le monde entier ».

« Israël tire profit de cette exploitation, alors qu'elle coûte à l'économie palestinienne au moins 35 % de son PIB », note le rapport.

Les banques, les sociétés de gestion d'actifs, les fonds de pension et les assureurs ont « canalisé des financements vers l'occupation illégale » :

« Les universités, lieux de développement et de pouvoir intellectuels, ont soutenu l'idéologie politique qui sous-tend la colonisation des terres palestiniennes, qui développe des armes et qui néglige ou même approuve la violence systémique, tandis que les collaborations mondiales en matière de recherche ont masqué l'effacement des Palestiniens derrière un voile de neutralité académique. »

Les technologies de surveillance et d'incarcération sont « devenues des outils permettant de cibler sans discrimination la population palestinienne », note le rapport :

« Des engins lourds utilisés auparavant pour la démolition de maisons, la destruction d'infrastructures et la saisie de ressources en Cisjordanie ont été réaffectées à la destruction du paysage urbain de Gaza, empêchant les populations déplacées de revenir et de se reconstruire en tant que communauté. »

L'assaut militaire contre les Palestiniens a également « servi de terrain d'essai pour des capacités militaires de pointe : plateformes de défense aérienne, drones, outils de ciblage alimentés par l'intelligence artificielle et même le programme F-35 mené par les États-Unis d'Amérique. Ces technologies sont ensuite commercialisées comme étant "validées au combat" ».

Depuis 2020, Israël est le huitième exportateur d'armes au monde. Ses deux plus grandes entreprises d'armement sont Elbit Systems Ltd et l'entreprise publique Israel Aerospace Industries Ltd (IAI). Israël a conclu une série de partenariats internationaux avec des entreprises d'armement étrangères, notamment « pour l'avion de combat F-35, dirigé par la société américaine Lockheed Martin ».

« Les composants et les pièces construits dans le monde entier contribuent à la flotte israélienne de F-35, qu'Israël personnalise et entretient en partenariat avec Lockheed Martin et des entreprises nationales », indique le rapport. Depuis octobre 2023, les F-35 et les F-16 ont « joué un rôle essentiel dans l'équipement d'Israël avec une puissance aérienne sans précédent, lui permettant de larguer environ 85 000 tonnes de bombes, dont la plupart non guidées, tuant et blessant plus de 179 411 Palestiniens et détruisant Gaza ».

« Les drones, les hexacoptères et les quadcoptères sont également des machines à tuer omniprésentes dans le ciel de Gaza », peut-on lire dans le rapport :

« Les drones développés et fournis en grande partie par Elbit Systems et Israel Aerospace Industries volent depuis longtemps aux côtés des avions de chasse, surveillant les Palestiniens et fournissant des renseignements quant aux cibles à viser. Au cours des deux dernières décennies, grâce au soutien de ces entreprises et à des collaborations avec des institutions telles que le Massachusetts Institute of Technology (MIT), les drones utilisés par Israël ont acquis des systèmes d'armement automatisés et la capacité de voler en formation d'essaim. »

Les entreprises japonaises FANUC vendent des produits d'automatisation et « fournissent des engins robotisés pour les chaînes de production d'armes, notamment pour IAI, Elbit Systems et Lockheed Martin ». « Les compagnies maritimes telles que la société danoise A.P. Moller - Maersk A/S transportent des composants, des pièces, des armes et des matières premières, assurant ainsi un flux régulier d'équipements militaires fournis par les États-Unis depuis octobre 2023 ».

« Les dépenses militaires israéliennes ont augmenté de 65 % entre 2023 et 2024, pour atteindre 46,5 milliards de dollars, soit l'un des montants les plus élevés par habitant dans le monde. [Cela] a généré une forte augmentation de leurs bénéfices annuels, [tandis que] les entreprises étrangères d'armement, en particulier les producteurs de munitions et de matériel de guerre, en tiraient également profit. »

Dans le même temps, les entreprises de la tech ont tiré des bénéfices du génocide en « fournissant une infrastructure à double usage pour intégrer la collecte de données de masse et la surveillance, tout en profitant de ce terrain d'essai unique pour la technologie militaire qu'est le territoire palestinien occupé » :

« [Elles optimisent] les infrastructures carcérales et de surveillance, depuis les réseaux de télévision en circuit fermé (CCTV), la surveillance biométrique, la technologie avancée des points de contrôle, les “murs intelligents” et la surveillance par drone, jusqu'à l'informatique en cloud, l'intelligence artificielle et l'analyse de données qui appuient les forces militaires sur le terrain. »

Le rapport poursuit :

« Les entreprises israéliennes de la tech se développent souvent à partir d'une infrastructure et d'une stratégie militaires, comme l'a fait le groupe NSO, fondé par d'anciens membres de l'Unité 8200. Son logiciel espion Pegasus, conçu pour la surveillance secrète des smartphones, a été utilisé à l'encontre des militants palestiniens et utilisé sous licence dans le monde entier pour cibler des dirigeants, des journalistes et des défenseurs des droits humains. Exportée en vertu de la loi sur le contrôle des exportations de défense, la technologie de surveillance du groupe NSO permet une “diplomatie du logiciel espion” tout en renforçant l'impunité des États. »

IBM, dont la technologie a permis à l'Allemagne nazie de générer et de compiler des cartes perforées pour les données de recensement national, la logistique militaire, les statistiques des ghettos, la gestion du trafic ferroviaire et la capacité des camps de concentration, est une fois de plus un partenaire dans le génocide actuel.

IBM opère en Israël depuis 1972 et assure la formation des agences militaires et de renseignement israéliennes, en particulier l'unité 8200, qui est en charge des opérations clandestines, de la collecte de renseignements sur les signaux et du décryptage de codes, ainsi que du contre-espionnage, de la cyberguerre, du renseignement militaire et de la surveillance. Comme le précise le rapport :

« Depuis 2019, IBM Israël exploite et met à jour la base de données centrale de l'Autorité de la population et de l'immigration, permettant la collecte, le stockage et l'utilisation gouvernementale de données biométriques concernant les Palestiniens, et soutenant le régime discriminatoire des laissez-passer accordés par Israël. »

Microsoft, présent en Israël depuis 1989, est « implanté dans l'administration pénitentiaire, la police, les universités et les écoles, y compris dans les colonies. Depuis 2003, Microsoft intègre ses systèmes et sa technologie civile au sein de l'armée israélienne, tout en acquérant des start-up israéliennes spécialisées dans la cybersécurité et la surveillance ».

« Alors que les systèmes israéliens d'apartheid, militaires, et de contrôle de la population génèrent des volumes croissants de données, leur dépendance à l'égard du stockage et de l'informatique en cloud s'est accrue. [...] En 2021, Israël a attribué à Alphabet Inc. (Google) et Amazon.com, Inc. un contrat de 1,2 milliard de dollars (Projet Nimbus), financé en grande partie par le budget du ministère de la Défense, afin de fournir une infrastructure technologique clé ».

Microsoft, Alphabet Inc. et Amazon « octroient à Israël un accès quasiment gouvernemental à leurs technologies de cloud et d'intelligence artificielle, améliorant ainsi le traitement des données, la prise de décision et les capacités de surveillance et d'analyse ».

L'armée israélienne, souligne le rapport, « a développé des systèmes d'intelligence artificielle tels que “Lavender”, “Gospel” et “Where's Daddy” pour traiter les données et générer des listes de cibles, remodelant ainsi la guerre moderne et illustrant la nature à double usage de l'intelligence artificielle ».

Le rapport d'Albanese indique qu'il existe des « motifs raisonnables » de penser que Palantir Technology Inc, qui entretient depuis longtemps des relations avec Israël, « a fourni une technologie policière prédictive automatique, une infrastructure de défense clé pour la construction et le déploiement rapides et à grande échelle de logiciels militaires, ainsi que sa plateforme d'intelligence artificielle, qui permet l'intégration en temps réel des données du champ de bataille en vue d'une prise de décision automatisée ».

En avril 2025, le PDG de Palantir a répondu aux accusations selon lesquelles Palantir tue des Palestiniens à Gaza en déclarant : « pour l'essentiel des terroristes, c'est vrai ». Et le rapport poursuit :

« Les technologies civiles servent depuis longtemps d'outils à double usage pour l'occupation coloniale. [...]  Les opérations militaires israéliennes s'appuient fortement sur les équipements proposés par les principaux fabricants mondiaux pour “déraciner” les Palestiniens de leurs terres, en démolissant les maisons, les bâtiments publics, les terres agricoles, les routes et autres infrastructures essentielles. Depuis octobre 2023, ces équipements ont contribué à endommager et à détruire 70 % des structures et 81 % des terres cultivées à Gaza. »

Depuis des décennies, Caterpillar Inc. fournit à l'armée israélienne des équipements utilisés pour démolir des maisons, des mosquées et des hôpitaux palestiniens, ainsi que pour « enterrer vivants des Palestiniens blessés » et tuer des militants, comme Rachel Corrie. Toujours selon le rapport :

« Israël a fait évoluer le bulldozer D9 de Caterpillar pour en faire le cœur de l'armement automatisé et télécommandé de l'armée israélienne, déployé lors de pratiquement toutes les activités militaires depuis 2000, dégageant des lignes d'incursion, “neutralisant” le territoire et tuant des Palestiniens. [Caterpillar] s'est même assuré un nouveau contrat de plusieurs millions de dollars avec Israël cette année. »

Et la sinistre liste d'entreprises complices se poursuit :

« Le groupe coréen HD Hyundai et sa filiale à participation Doosan, ainsi que le groupe suédois Volvo et d'autres grands fabricants d'engins lourds, sont depuis longtemps liés à la destruction de biens palestiniens, chacun fournissant des équipements par l'intermédiaire de concessionnaires israéliens exclusivement agréés. [...]

En contribuant à la destruction de la vie des Palestiniens dans les territoires occupés de la Palestine, les entreprises aident également à la construction de ce qui vient la remplacer : construction de colonies et de leurs infrastructures, extraction et commerce de matériaux, d'énergie et de produits agricoles, et accueil de visiteurs dans les colonies comme s'il s'agissait d'une destination de vacances ordinaire. [...] »

« Plus de 371 colonies et avant-postes illégaux ont été construits, alimentés en énergies et exploités par des entreprises qui favorisent le remplacement par Israël de la population autochtone dans les territoires palestiniens occupés », conclut le rapport.

Ces projets de construction ont utilisé des excavateurs et des équipements lourds Caterpillar, HD Hyundai et Volvo. Hanson Israël, filiale de la société allemande Heidelberg Materials AG, « a contribué au pillage de millions de tonnes de roches dolomitiques provenant de la carrière de Nahal Raba, située sur des terres saisies à des villages palestiniens en Cisjordanie ». La dolomie extraite est utilisée pour construire des colonies juives en Cisjordanie.

Les entreprises étrangères ont également « contribué au développement de routes et d'infrastructures de transport public essentielles à l'établissement et à l'expansion des colonies, et les ont reliées à Israël tout en excluant et en pratiquant une ségrégation à l'encontre des Palestiniens ».

Des sociétés immobilières internationales vendent des propriétés dans les colonies à des acheteurs israéliens et internationaux. Ces sociétés immobilières comptent Keller Williams Realty LLC, qui, par l'intermédiaire de son franchisé israélien KW Israel, a « des branches situées dans les colonies ». L'année dernière, par l'intermédiaire d'un autre franchisé appelé Home in Israel, Keller Williams « a organisé au Canada et aux États-Unis, une tournée de présentation de l'immobilier, parrainée conjointement avec plusieurs sociétés qui développent et commercialisent des milliers d'appartements dans les colonies ».

Des plateformes de location, dont Booking.com et Airbnb, répertorient des propriétés et des chambres d'hôtel dans des colonies juives illégales en Cisjordanie.

Chinese Bright Dairy & Food est un propriétaire majoritaire de Tnuva, le plus grand conglomérat alimentaire d'Israël, qui exploite des terres arrachées aux Palestiniens en Cisjordanie. Dans le secteur de l'énergie :

« Chevron Corporation, en consortium avec l'entreprise israélienne NewMedEnergy (une filiale du groupe Delek répertorié dans la base de données du HCDH), extrait du gaz naturel depuis les gisements Leviathan et Tamar ; elle a versé au gouvernement israélien 453 millions de dollars en redevances et taxes en 2023. Le consortium Chevron assure plus de 70 % de la consommation énergétique israélienne. Chevron tire également profit de sa participation au gazoduc de la Méditerranée orientale, qui traverse le territoire maritime palestinien, et des ventes de gaz à l'exportation vers l'Égypte et la Jordanie. [...]

[BP et Chevron sont] les plus grands contributeurs concernant les importations israéliennes de pétrole brut, dans la mesure où ils sont les principaux propriétaires de l'oléoduc stratégique azéri Bakou-Tbilissi-Ceyhan et du Kazakh Caspian Pipeline Consortium, respectivement, et de leurs champs pétrolifères associés. Chaque conglomérat a en fait fourni 8 % du pétrole brut israélien entre octobre 2023 et juillet 2024, ce qui a été complété par des livraisons de pétrole brut provenant de gisements pétroliers brésiliens, dont les participations les plus importantes sont détenues par Petrobras, et par du carburéacteur militaire. Le pétrole de ces entreprises alimente deux raffineries en Israël. »

Dès lors, toujours selon le rapport d'Albanese :

« En fournissant à Israël du charbon, du gaz, du pétrole et du carburant, les entreprises contribuent aux infrastructures civiles qu'Israël utilise pour asseoir son annexion permanente et qu'il utilise maintenant comme arme pour détruire la vie des Palestiniens à Gaza. Ces mêmes infrastructures auxquelles ces entreprises fournissent des ressources sont au service de l'armée israélienne et de l'anéantissement de Gaza par le biais de technologies à forte consommation d'énergie. »

Les banques et les sociétés financières internationales soutiennent également le génocide en achetant des bons du Trésor israélien :

« En tant que principale source de financement du budget de l'État israélien, les bons du Trésor jouent un rôle essentiel dans le financement de l'assaut en cours contre Gaza. [...] De 2022 à 2024, le budget militaire israélien est passé de 4,2 % à 8,3 % du PIB, faisant plonger le budget public dans un déficit de 6,8 %. Israël a financé ce budget hypertrophié en augmentant ses émissions d'obligations, notamment à hauteur de 8 milliards de dollars en mars 2024 et de 5 milliards de dollars en février 2025, parallèlement à une émission en nouveaux shekels [monnaie nationale d'Israël, NdT] sur son marché intérieur. »

Le rapport d'Albane révèle aussi que certaines des plus grandes banques du monde, dont BNP Paribas et Barclays, « sont intervenues pour renforcer la confiance du marché en souscrivant ces obligations du Trésor nationales et internationales, ce qui a permis à Israël de contenir la hausse de ses taux d'intérêt, en dépit d'une dégradation de sa solvabilité. Des sociétés de gestion d'actifs, dont Blackrock (à hauteur de 68 millions de dollars), Vanguard (à hauteur de 546 millions de dollars) et la filiale de gestion d'actifs d'Allianz, PIMCO (à hauteur de 960 millions de dollars), figuraient parmi les 400 investisseurs originaires de pas moins de 36 pays qui les ont achetées ».

Les organisations caritatives confessionnelles sont « également devenues les principaux soutiens financiers de projets illégaux, notamment dans les territoires palestiniens occupés, bénéficiant souvent de déductions fiscales à l'étranger en dépit de cadres réglementaires stricts en matière de bienfaisance ».« Le Fonds national juif (KKL-JNF) et ses plus de 20 affiliés financent l'expansion des colonies et des projets liés à l'armée », indique le rapport. Et Albanese poursuit :

« Depuis octobre 2023, des plateformes comme Israel Gives ont permis des financements par crowdfunding, déductibles des impôts, dans 32 pays à destination d'unités militaires et des colons israéliens. Les Amis chrétiens des communautés israéliennes, association basée aux États-Unis, les chrétiens néerlandais en faveur d'Israël et leurs affiliés dans le monde, ont envoyé plus de 12,25 millions de dollars en 2023 pour abonder divers projets qui soutiennent les colonies, parmi lesquels on trouve ceux qui assurent la formation des colons extrémistes. »

Le rapport de Francesca Albanese est également très critique vis-à-vis des universités qui ont des partenariats avec des universités et institutions israéliennes. Il note que des laboratoires du MIT « mènent des recherches sur les armes et la surveillance financées par le ministère israélien de la Défense ». Parmi ces projets figurent « le contrôle des essaims de drones, un élément caractéristique de l'assaut israélien sur Gaza depuis octobre 2023, ainsi que les algorithmes de poursuite et la surveillance sous-marine ».

Un génocide exige un vaste réseau et des milliards de dollars pour le soutenir. Sans cet écosystème, Israël ne pourrait pas mener à bien son massacre de masse des Palestiniens. Ces entités, qui tirent profit de la violence industrielle contre les Palestiniens et des déplacements massifs de population, sont tout aussi coupables de génocide que les unités militaires israéliennes qui déciment la population de Gaza. Elles sont, elles aussi, coupables de crime de guerre ; elles aussi doivent rendre des comptes.

Textes traduits et reproduits avec l’autorisation de Chris Hedges.
Source : Scheerpost — 02/07/2025 et 10/07/2025

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