Depuis l’élection de Donald Trump, pas un jour ne passe sans qu’un nouvel événement ne remette en cause l’ordre des choses censé régir les sociétés occidentales depuis la Seconde Guerre mondiale. L’ampleur et la rapidité de ces changements, rythmés par les annonces pittoresques du président américain, du vice-président J.D. Vance et d’Elon Musk, plongent les intellectuels américains et les élites européennes dans la sidération ; elles mettent également les analystes au défi de caractériser la nature de ce qui se passe.

L’historien Timothy Snyder parle d’un coup d’État digital et oligarchique qui vise à « défaire la pratique démocratique ». Mais au profit de quoi ? Comment qualifier le trumpisme ? « Extrême droite ? Fascisme ? Libertarien ? Techno-populiste ? Chacun de ces qualificatifs peut se justifier. Le problème est qu’ils sont largement incompatibles entre eux », note ainsi David Cayla. Malgré leur apparente incohérence, les actions de Donald Trump lui semblent cependant « construites autour d’une ligne claire : la remise en cause systématique des principes de la gouvernance néolibérale » au profit d’un modèle de fonctionnement rappelant celui d’une société féodale.
L’interrogation ne vaut pas seulement pour le fonctionnement des agences fédérales américaines. Ce qui s’y déroule n’est pas qu’une affaire domestique : vu le statut des États-Unis sur la scène internationale et dans l’économie mondiale, vu également la nature planétaire des systèmes d’information que contrôlent les patrons de la tech alliés à Donald Trump, les événements en cours concernent tout aussi bien le fonctionnement global du monde.
Signent-ils réellement le retour de formes d’organisation sociale passées – ce qui sonnerait le glas de toute vision linéaire de l’histoire ? Ou bien assiste-t-on à l’émergence de structures sociales nouvelles, voire d’un nouveau stade historique ?
Du modèle féodal au technoféodalisme
La féodalité classique, qui a existé en Occident au Moyen Âge, est un système politique et social qui se caractérise par la faiblesse ou l’inexistence du pouvoir central, des liens de patronage et de subordination entre suzerains et vassaux, détenteurs de fiefs, et une économie fondée sur l’extraction par la noblesse à la paysannerie d’une rente due à sa possession des terres, le tout marqué par l’importance des liens personnels. Ce système a disparu à la faveur de la modernité, laissant place à des États centralisés, d’abord monarchiques puis démocratiques.
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