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Depuis 10 ans, le montant de la dette publique américaine détenue à l’étranger est resté globalement stable. La hausse de la dette publique a en effet été absorbée principalement par la banque centrale. Le fait marquant est cependant une forte baisse de la détention de dette par la Chine, qui se débarrasse lentement mais surement de sa dette américaine.

Graphe Économie
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publié le 15/05/2023 Par Olivier Berruyer
La Chine continue de se débarrasser de sa dette américaine
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La dette publique fédérale américaine ne cesse de croître depuis 20 ans. Partie d’environ 10 000 Md$, elle approche désormais les 35 000 Md$. Elle est détenue par différents investisseurs.

Depuis 20 ans, la dette publique fédérale américaine détenue par des investisseurs étrangers est passée de 1 700 Md$ en 2000 à 7 500 Md$. C’est notamment entre 2008 et 2015 que cette partie de la dette publique a fortement augmenté, de 4 000 Md$. Ensuite, c‘est la banque centrale américaine, la Fed, qui a pris le relais jusqu’en 2022 – permettant même un recul de cette dette détenue par l’étranger.

En observant la détention de la dette américaine par nationalité, on constate clairement l’essor de la Chine comme premier créancier étranger à partir de 2008. Avec 800 Md$ de dette fédérale détenus, le pays s’était alors hissé devant le Japon, pourtant partenaire commercial de longue date des États-Unis. Cette dette détenue par la Chine a atteint près de 1 800 Md$ en 2016, et n’a cessé de décroître depuis.

Début 2023, le Japon et la Chine — secteurs public et privé cumulés — détiennent désormais le même montant de dette fédérale américaine : 1 200 Md$. Le troisième créancier étranger des États-Unis est le Royaume-Uni, qui détient environ 600 Md$ de dette fédérale américaine.

Par ailleurs, on note quelques surprises parmi les premiers détenteurs de dette publique américaine :

- Les banques des Caraïbes détiennent 400 Md$ de dette américaine, notamment via les îles Caïmans, où de nombreuses institutions financières américaines sont installées pour des raisons fiscales, et achètent des titres d’État.

- De la même manière, l’Irlande détient 330 Md$ de dette publique américaine, en raison des achats de titres d’État par les grands groupes américains (Google, Apple, Facebook, Microsoft) qui y ont établi leurs sièges sociaux européens pour des raisons fiscales.

- Enfin, la Suisse abrite également de grands groupes financiers attirés par sa fiscalité et acheteurs de dette publique américaine, ce qui en fait le sixième détenteur, avec 300 Md$.

Depuis 2016, une dette moins demandée

Le détail des variations des détentions de dette publique américaine permet de voir plus précisément les dynamiques à l’œuvre sur la période récente. Le graphique ci-dessous fait ainsi clairement apparaître l’accélération de l’achat de dette par des investisseurs étrangers durant cinq années consécutives, de 2008 à 2012.

C’est durant cette période — en pleine crise des subprimes — que la Chine a acheté massivement la dette émise par les États-Unis, tout comme le Japon. On perçoit également, à partir de 2015, la décrue de la détention étrangère de dette américaine, notamment causée par la revente par la Chine de ses bons du Trésor américain dès 2016.

La Chine a accéléré ses ventes de dette américaine

Depuis début 2016, la Chine a ainsi revendu 600 Md$ de bons du Trésor américain, avec un pic de 80 Md$ revendus en novembre 2016. Pour certains, le pays a réagi aux mesures protectionnistes américaines par la vente de ces titres de la dette américaine. Pour d’autres, c’est un objectif de stabilisation de sa monnaie, c’est-à-dire de son taux de change.

Concernant le Japon, on constate sur le graphique ci-dessous le désengagement de Tokyo entre 2004 et 2008, puis l’acquisition massive de dette américaine jusqu’en 2015. Depuis, la détention japonaise de la dette fédérale américaine oscille autour de 1 300 Md$.

Si l’on se concentre sur les deux dernières années, on constate que la Chine n’achète plus de dette américaine, contrairement au Royaume-Uni et au Japon. Londres a ainsi acheté 380 Md$ de dette publique américaine depuis janvier 2019, et Tokyo environ 50 Md$. Dans le même temps, Pékin en a cédé 250 Md$.

On distingue en particulier un afflux remarquable des autres pays du monde vers la dette américaine en juin 2021. Cela est notamment dû à l’acquisition de dette américaine par les pays européens : les investisseurs français ont ainsi acquis 230 Md$ de dette américaine en un mois.

Actuellement, l’ensemble des autres pays du monde — en dehors de l’Irlande, du Royaume-Uni, des banques des Caraïbes, de la Chine et du Japon — représentent 3 700 Md$, soit la moitié de la dette publique américaine détenue par l’étranger.

Après ces années de désengagement récent, la Chine ne représente plus que 15 % de la dette étrangère, soit seulement 4 % de la totalité de la dette publique fédérale américaine, comme le Japon.

Ces chiffres laissent penser que Pékin ne détient pas assez de dette américaine pour faire pression sur les États-Unis en la revendant massivement, dans l’éventualité d’un conflit commercial – ou pire. De plus, la vente massive de ces titres pourrait provoquer une appréciation du yuan, qui pénaliserait les exportations chinoises. La Chine semble cependant se débarrasser de sa dette américaine à un rythme suffisamment lent pour ne pas subir de tels inconvénients. Est-ce un signe que la Chine se prépare à de graves tensions à venir entre les deux pays ?

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