Sur fond de spéculations sans fin sur une possible frappe nucléaire tactique en Ukraine, les responsables occidentaux ont multiplié ces derniers temps les prises de position maximalistes, renonçant à la mesure et au sang-froid. Un emballement que la France, pour une fois, a tenu à corriger.

publié le 23/11/2022 Par Éric Juillot
« Apocalypse nucléaire » et guerre en Ukraine : halte au feu !

Sur le front de la guerre en Ukraine et de ses implications internationales, les dernières semaines ont atteint des sommets en matière de communication guerrière. La possibilité d’une apocalypse nucléaire a été évoquée à plusieurs reprises par des dirigeants politiques de premier plan, chacun tenant tout à la fois à alerter sur le risque d’une escalade incontrôlable tout en s’en faisant paradoxalement l’agent.

La seule évocation d’une possible guerre nucléaire concourt en effet à la banalisation de ce qui devrait rester, dans les mots aussi bien que dans les actes, de l’ordre de l’exception. Mais les responsables politiques concernés ne peuvent s’empêcher de penser qu’il en va sur ce sujet de leur crédibilité, et que celle-ci se joue, non pas sur leur silence, mais sur leurs propos alarmistes ou leurs mises en garde tonitruantes.

Du côté occidental, cette manière de voir semble aller de soi en raison du sombre choix de la guerre fait par Moscou, quelles que soient les responsabilités des uns et des autres dans le déclenchement d’un conflit en gestation depuis longtemps. Ce choix vertigineux contribue en lui-même à accréditer l’idée que le « pire du pire » est désormais possible. Ceux qui tenteraient de conserver leur sang-froid en sont dissuadés par les discours infamants et les préjugés antirusses (confondant population et dirigeants politiques) qui encombrent l’espace médiatique depuis février.

Mais la diabolisation des Russes et de leur président n’est pas sans effet pervers, car elle alimente une propension à la peur et à l’irrationalité qui catalyse la montée rhétorique aux extrêmes : pour se prémunir d’un pays capable de tout, il faut l’être soi-même également. Privilégier la voie du dialogue et de la négociation, même lorsque l’on n’est pas directement impliqué dans la guerre, est soudainement vu comme la (fausse) preuve d’une faiblesse irresponsable.

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