Depuis l’avènement au pouvoir de Xi Jinping, la Chine a un projet hégémonique. Ali Laïdi, chroniqueur à France 24, responsable du Journal de l’Intelligence économique, co-fondateur de l’École de pensée sur la guerre économique (EPGE) et auteur de La Chine ou le réveil du guerrier économique (Acte Sud, 2023), décrit les forces et les faiblesses de Pékin et souligne l’opportunité que donne la stratégie de la Chine à l’Occident de cultiver une certaine humilité sur la scène internationale.
Laurent Ottavi (Élucid) : Quelles sont les causes de l’essor économique chinois et qui est à l’origine de cette stratégie gagnante ?
Ali Laïdi : La stratégie a été lancée en 1976 à la mort de Mao par Deng Xiaoping et suivie jusqu’à aujourd’hui de façon discrète et affichée en même temps. Elle a permis de faire passer la Chine d’un des pays les plus pauvres au monde au milieu des années 1970 à une puissance économique et militaire de premier plan. La grande force de ce pays a été d’avoir su s’appuyer sur différents standards et champs de réflexion. D’abord et avant tout, il s’est ouvert au capitalisme, même s’il en a fait un capitalisme d’État. Il a ensuite adopté un modèle d’intelligence économique qui s’est inspiré des États-Unis et de l’Europe, en particulier de la France, et du système japonais parvenu à se redresser après la fin de la Seconde Guerre mondiale, jusqu’à challenger les États-Unis.
La Chine a par ailleurs su puiser dans ses référents traditionnels du confucianisme, remontant jusqu’à très loin dans son histoire à l’époque des royaumes combattants (IVe, Ve siècle avant J.-C.). Elle a enfin adopté le marxisme-léninisme, une idéologie très présente de 1947 jusqu’à la mort de Mao, dans une version très rabougrie toutefois, et mêlée à partir de 1976 au meilleur du capitalisme, du modèle américain, français, japonais et de la tradition chinoise.
Élucid : Quelles sont en revanche les limites à cette réussite ?
Ali Laïdi : J’identifie une limite évidente, frappante et que Xi Jinping ne veut pas voir. Jusqu’à lui, les présidents ont respecté la position de Deng Xiaoping qui consistait à acquérir de plus en plus de puissance tout en rasant les murs, en étant discret. Xi Jinping, lui, ne cache pas de vouloir faire de la Chine la première puissance mondiale et fait remonter le marxisme-léninisme à la surface. Ce modèle n’est pourtant pas exportable. Nous pouvons accepter le modèle américain en Europe avec ses séries, sa musique, son entertainment, mais nous n’accepterons jamais un modèle fondé sur le parti unique et le marxisme-léninisme.
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