Suite au coup d’État du général Min Aung Hlaing, le 1er février 2021, le Myanmar (ex-Birmanie) a sombré dans une guerre civile sans fin. Le renversement du gouvernement d’Aung San Suu Kyi a été unanimement condamné par la communauté internationale, à deux singularités près. La première exception est la Russie. Moscou, « inquiet », déplore la répression sanglante de la junte tout en continuant à lui fournir armes et munitions, devenant le premier pourvoyeur d’un conflit qui a généré plus de 50 000 victimes. Ces liens ne sont pas sans rappeler les relations équivoques qu’entretiennent les États-Unis avec Israël. La seconde est la Chine. Pékin s’est révélée en dessous de tout : les organes de presse évoquent, non pas un coup d’État, mais un « remaniement ministériel majeur ». La rengaine officielle de la diplomatie chinoise martèle que la Chine ne se « mêle pas des affaires intérieures d’autrui » au nom d’un principe d’une « coexistence pacifique ». En réalité, s’il existe un pays où la République populaire de Chine (RPC) ne cesse d’intervenir depuis son avènement en 1949, c’est bien le Myanmar, un pays où tout est permis ou presque.
Mong La, au printemps 2006, une ville frontalière située aux confins nord-est du Myanmar et du sud-ouest de la Chine ne laisse personne indifférent. Le regard vissé sur un mur enrichi d’une peau de bête, je récupère distraitement la clé tendue par la réceptionniste de l’hôtel. Dans quel merdier j’ai foutu les pieds ?! Impossible d’en détacher l’œil, c’est bien une p… de peau de tigre ! À vendre évidemment. Cinquante-huit mille renminbis, soit approximativement 6 000 euros à l’époque.
Comment décrire Mong La ? Pensez à un mélange d’Apocalypse Now, de Westworld, de Voyage au bout de la nuit et vous n’y serez pas encore. Entre le marché culinaire avec félins, serpents, pangolins et autres mets en voie d’extinction, les salons de massage aux enseignes explicites, les tripots plus ou moins clandestins pour n’évoquer que les activités publiques, chacun est libre d’y satisfaire ces turpitudes les plus inavouables. Votre limite est celle de votre bourse…
L’emprise historique de la Chine
Cet improbable « mini Las Vegas asiatique », déclaré « opium free » seulement en 1997, a proliféré telle une plante parasite, face au poste frontière chinois de Daluozhen. Chinois ordinaires, mais aussi agents de l’État franchissaient à toute heure et sans le moindre contrôle la frontière pour s’en venir flamber leurs économies dans les casinos de Mong La. De hauts fonctionnaires y débarquaient motorisés et repartaient à pied, abandonnant derrière eux leurs véhicules officiels afin d’éponger leurs dettes de jeu. Pékin finit par s’en émouvoir et, en juillet 2005, la police chinoise traverse la frontière pour récupérer ses biens.
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