Le Soudan est habitué aux troubles internes. Les longs conflits au Darfour et dans ce qui est aujourd’hui devenu le Soudan du Sud, qui ont secoué le pays pendant des décennies, n’ont sans doute pas été mis en lumière aussi souvent qu’il aurait fallu. Mais le profond désintérêt de la « communauté internationale » laisse perplexe au vu de l’ampleur de la crise humanitaire actuelle, véritablement sans précédent. Comment expliquer une telle indifférence ?
La guerre civile soudanaise qui fait rage depuis deux ans déjà est un conflit terriblement meurtrier, s’inscrivant en cela dans la continuité des conflits qui secouent la région depuis des décennies. Ni l’indépendance du Soudan du Sud en 2011, ni le renversement du dictateur et criminel de guerre Omar al-Bachir en 2019 n’ont apporté de solution durable. La tentative de transition démocratique, sous la direction d’Abdallah Hamdok, un exilé sans grande influence, a été brutalement interrompue par un coup d’État mené par deux des lieutenants d’al-Bachir : le général Abdel Fattah al-Bourhane, ainsi que Mohammed Hamdan Dogolo, chef des Forces de soutien rapide (ou FSR), surnommé Hemedti. Le conflit actuel, qui a éclaté le 15 avril 2023, est lié à la brouille entre les deux hommes, qui se disputent depuis lors le contrôle du pays.
Là où al-Bourhane commande l’armée soudanaise régulière, les FSR de Hemedti constituent une force de combat plus nébuleuse. Composées en immense majorité de milices Janjawids – c'est-à-dire provenant de certaines tribus arabes ou arabisées principalement originaires du Darfour – les FSR ont longtemps servi d’adjuvants aux forces soudanaises régulières durant la guerre du Darfour, entre 2003 et 2020, durant laquelle elles se sont battues contre divers groupes armés originaires de la région. Les FSR s’y distinguèrent par leur extrême violence et par leur participation directe aux actes à caractère génocidaire relevés par les Nations unies.
Le conflit a été initialement perçu comme une simple rivalité entre deux généraux. Néanmoins, au fil du temps, les exactions systématiques commises par les FSR à l’encontre de tous les groupes minoritaires non arabes dans les régions qu’elles contrôlent ont fini par polariser la population soudanaise, qui commence à percevoir l’armée régulière comme préférable à une généralisation des massacres. La situation est devenue si critique que plusieurs des groupes rebelles du Darfour qui avaient originellement combattu le gouvernement soudanais durant la guerre du Darfour se sont ralliés à lui pour lutter contre les FSR.
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