Pour assurer durablement la paix, il faut réapprendre à penser géopolitiquement, dans un monde où les États et les nations n’ont pas vocation à disparaître mais plutôt à s’affirmer. Cela suppose un dialogue permanent entre puissances, des diplomates et des hommes d’État soucieux de pondération, capables de prendre en compte les intérêts de chacun et conscients que si la guerre est parfois inévitable, elle ne devrait jamais être perçue comme préférable.
La guerre en Ukraine révèle la profonde divergence des cultures stratégiques de la Russie et des États occidentaux. Il en découle une relation pleine de dangers, où l’incapacité à comprendre l’autre dégénère, du fait de la guerre, dans un processus d’infériorisation réciproque légitimant la perspective d’un affrontement.
À la Russie, qui raisonne selon les canons de la géopolitique classique, s’oppose les États occidentaux, gagnés à des degrés divers, depuis trente ans, par des croyances post-historiques issues du néolibéralisme contemporain.
Temps long contre temps suspendu
Une première différence majeure réside dans le rapport au temps. Si la Russie inscrit sa stratégie dans le temps long, l’Occident, de son côté, se meut dans un temps suspendu. Quand la première déploie ses ambitions méthodiquement, année après année, pour en obtenir des effets majeurs à l’échelle des décennies ; quand elle tente de maintenir dans sa politique étrangère une cohérence au profit de buts supérieurs clairement définis ; quand le réalisme de ces objectifs est régulièrement soupesé ; quand ils sont justifiés ultimement par une inscription dans la longue durée de l’Histoire, les Occidentaux, de leur côté, se caractérisent par un rapport au temps inédit, déconnecté du passé aussi bien que de l’avenir, centré sur un présent perpétuel difficilement compatible, dans les faits, avec une réelle entreprise stratégique.
Une anecdote tout à fait significative servirait à illustrer cette affirmation en première approche. Lors de la première visite de Vladimir Poutine à Emmanuel Macron en mai 2017, le chef de l’État russe évoqua devant le président français, pour rappeler la profondeur et l’ancienneté des relations entre la France et la Russie, l’union du roi de France Henri 1er avec la princesse russe Anne de Kiev en 1051.
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