Quand la discrimination positive scinde une société : le cas de la Malaisie

À l’heure où en France la droite nationaliste et autoritaire souhaite différencier les Français dits « de souche » des autres, la Malaisie s’interroge sur l’avenir de son système de discrimination positive vieux d’un demi-siècle.

publié le 30/01/2023 Par Jack Thompson
Quand la discrimination positive scinde une société : le cas de la Malaisie

Héritage historique et géographique, la péninsule malaise fut le théâtre d’un intense brassage humain lié au détroit de Malacca reliant l’empire du Milieu aux Indes, où s’entremêlent Chinois, Indiens et Malais. Chacun y a apporté ses idiomes, ses croyances et sa culture propre dans une union singulière qui ne va pas sans heurts. Au cœur de la vie politique malaisienne se retrouve une notion fondamentale, celle de l'ethnie, qui fixe la position sociale de tous les Malaisiens (1). Particularité, l’article 160 de la Constitution de 1957 (année de l’indépendance) définit le Malais selon trois critères : sa langue (le malais), sa religion (l’islam) et ses coutumes (manger avec les mains, etc.).

À partir de 1963, tandis que les États du Sabah et du Sarawak de populations autochtones non malaises entrent dans la fédération de Malaisie, l’expression bumiputera, les « fils » ou « princes du sol » s’amalgame sinon se substitue à celui de Malais.

Bumiputera, un concept à géométrie variable…

Dès que l’on y regarde de plus près, cette notion de bumiputera englobe un concept extrêmement clivant. Ce mot définirait les seuls véritables natifs de la Malaisie, dont les Malais. D’emblée, l’association entre bumiputera et islam (religion d’État) semble s’imposer. La réalité se révèle bien plus tortueuse : on peut être musulman sans être bumiputera et vice-versa. C’est le cas au Sarawak où l’ethnie des Dayaks professe majoritairement le christianisme tout en étant reconnue comme bumiputera.

Les Peranakans Cina sont les descendants des commerçants chinois établis à demeure depuis plus d’un demi-millénaire. D’ascendance chinoise et considérés comme ethniquement chinois même s’ils s’expriment en malais et ne comprennent plus le chinois, ces Peranakans Cina n’ont jamais obtenu le statut de bumiputera. Il en va de même pour les Indiens et les Peranakans India.

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