Depuis la prise de la ville de Goma, chef-lieu de la province du Nord-Kivu, en République démocratique du Congo (RDC), par le M23, le conflit dans l’est du pays se rappelle inopinément au bon souvenir du reste du monde. Pourtant, les affrontements sporadiques dans la région du Kivu ne constituent nullement une nouveauté, se poursuivant depuis plus de vingt ans. En quoi le succès du M23 change-t-il la donne ? Pourquoi suscite-t-il soudain une réaction des observateurs internationaux, jusqu’alors impassibles ? Outre les considérations humanitaires, la réponse réside également dans les machinations d’un petit mais influent voisin de la RDC : le Rwanda.

L’Afrique, et notamment l’Afrique subsaharienne, est un territoire auquel l’Occident ou plutôt les médias occidentaux songent généralement bien peu. Lorsqu’elle est évoquée, c’est généralement soit parce qu’un pays occidental est directement concerné – ce qui fut notamment le cas de la France, dont les forces armées ont été récemment mises à la porte par un grand nombre de pays africains francophones – soit parce qu’un événement à la portée trop importante pour être ignorée est survenu.
La prise des villes de Goma et de Bukavu par le M23 (Mouvement du 23 mars) fait partie de la seconde catégorie. Ces deux agglomérations, situées de part et d’autre du lac Kivu à proximité de la frontière avec le Rwanda et chacune peuplée de plus d’un million d’habitants, sont les chefs-lieux respectifs de deux provinces de la RDC, le Nord et Sud-Kivu.
Si la perte de contrôle par la RDC de ces deux villes, ainsi que du territoire alentour, pose déjà un problème en tant que tel, le principal motif d’inquiétude est la crise humanitaire qui risque de s’ensuivre. Non seulement les tensions interethniques aux origines mêmes du conflit peuvent faire craindre la survenue de massacres, mais la prise de contrôle des rives du lac Kivu par le M23 risque d’aggraver les problématiques de santé publique, dans une région particulièrement pauvre et sujette aux pénuries de nourriture et aux épidémies.
La prise de contrôle par un groupe rebelle, en seulement quelques jours, de deux agglomérations majeures semble avoir servi de signal d’alarme. D’autant que le M23 étend son influence largement au-delà des rives du lac Kivu, aussi bien vers le nord, au-delà du lac Edouard et en direction de la grande ville de Butembo, que vers le sud, le long de la frontière avec le Burundi, où il n’est plus qu’à une trentaine de kilomètres des rives du lac Tanganyika. L’incapacité de l’armée congolaise à riposter avec succès fait craindre une perte de contrôle durable d’une large portion de l’est de la RDC. La menace pesant sur la souveraineté congolaise est désormais très sérieuse.
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