Anticiper l’avenir, mais sans boule de cristal et sans algorithmes. Antoine Bueno, prospectiviste, a relevé ce pari dans Futur : Notre avenir de A à Z (Flammarion, 2020). Il explique dans le cadre de cet entretien le sens de sa discipline. Il propose également un cadre d’analyse permettant d’anticiper l’avenir de l’humanité, en cherchant à éviter les deux excès de la collapsologie et du transhumanisme.
Laurent Ottavi (Élucid) : La prédiction évoque en général la science ou l’occultisme. Quelle est l’originalité de la prospective ?
Antoine Bueno : La prospective est une démarche scientifique. C’est par ailleurs une spécialité franco-américaine. Créée par le philosophe et haut fonctionnaire Gaston Berger (1896-1960), elle est, plus profondément, le fruit de l’universalisme français. De leur côté, les Américains ont essayé, dès les années 1950, de faire des prévisions rationnelles à partir des éléments du présent. Je ne distingue pas de méthode particulière de prospective. Elle n’a pas, par exemple, ses process et ses protocoles.
À mon sens, la prospective consiste à rassembler les éléments multiples et variés permettant de stimuler et d’alimenter la réflexion sur le futur. Parmi eux : des articles, des livres ou des modèles informatiques et mathématiques à appliquer à un problème spécifique comme le font, par exemple, les actuaires des assureurs ou du ministère de l’Économie pour évaluer une probabilité d’occurrence ou un coût financier. Le prospectiviste doit se faire violence d’une certaine façon dans la mesure où l’humanité a un biais cognitif de refus des changements radicaux. Elle n’accepte pas l’idée que tout ce qu’elle a connu change.
Élucid : Vous vous appuyez également sur la fiction. En quoi permet-elle d’éclairer l’avenir ?
Antoine Bueno : Le réel n’est pas seulement fait d’évolutions graduelles. Il est aussi remodelé par beaucoup de cygnes noirs, c’est-à-dire d’événements parfaitement imprévisibles qui changent tout, tout d’un coup. La crise du Covid en est un, comme le furent l’assassinat de l’archiduc François-Ferdinand en 1914, l’effondrement de l’URSS ou le 11 septembre 2001.
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