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Le retour de la confiance des consommateurs européens, après la période de morosité liée à la pandémie de Covid-19, aura été de courte durée. Dès l’été 2021, les tendances se sont inversées : les Français sont retombés dans une forme de désespoir, décuplée par le début de la guerre en Ukraine, a fortiori avec les conséquences des sanctions internationales qui ont bouleversé l’équilibre économique mondial.

Graphe Économie
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publié le 01/10/2022 Par Olivier Berruyer
Consommation : une inquiétante déprime gagne le monde
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Nous assistons probablement au début d’une douloureuse démondialisation, que les Français perçoivent bien.

Commençons par rappeler que, contrairement à une petite musique fréquemment diffusée, ce ne sont pas véritablement les entreprises qui « créent de la richesse » ou « créent des emplois », mais la demande des produits des entreprises par les consommateurs. Aucune entreprise n’a pour objectif de créer des emplois l’année prochaine ; les entreprises veulent simplement vendre plus l’année prochaine, et elles feront ce qu’il est nécessaire pour assurer cette production, si elles sont sûres de pouvoir la vendre.

Cette demande, et donc l’état d’esprit du consommateur, est donc au cœur de notre système économique. S’il est optimiste, s’il achète de gaité de cœur, l’économie fonctionnera bien, c’est-à-dire qu’il y aura plus de pouvoir d’achat et moins de chômage. Si le consommateur est inquiet pour l’avenir, s’il est frappé par l’inflation non compensée au niveau de ses revenus, il sera craintif, épargnera plus et consommera moins, ce qui entraînera un cercle vicieux de difficultés économiques, de faillites, de chômage croissant et de baisse du pouvoir d’achat, inquiétant encore plus le consommateur.

Afin de suivre cet état d’esprit, chaque pays a créé un « indice de confiance du consommateur », basé sur de larges enquêtes d’opinion interrogeant les consommateurs, et analysant leur situation financière attendue, leur sentiment sur la situation économique générale, le chômage et leur capacité d'épargne.

Un indicateur supérieur à 100 signale une augmentation de la confiance des consommateurs envers la situation économique future, anticipant une baisse de l’épargne et une volonté de dépenser de l'argent pour des achats importants au cours des 12 prochains mois. Les valeurs inférieures à 100 indiquent une attitude pessimiste envers l’avenir, entraînant possiblement une tendance à épargner davantage et à consommer moins.

Cette analyse va ainsi permettre d’anticiper notre futur économique lors des prochains mois, de façon à ce que chacun puisse s’y préparer au mieux.

La France plonge lourdement dans le pessimisme

En France, l’indice de confiance du consommateur est resté au beau fixe entre 1997 et 2007, avant de plonger en zone rouge après les crises des subprimes et de la zone euro entre 2008 et 2017. L’accalmie a été brève, le moral a rechuté dès 2018, un mouvement amplifié par la crise du Covid. Après une année 2020 désastreuse, avec un indice de 98, la reprise économique amorcée en 2021 avait de nouveau sorti la confiance du consommateur français du marasme, la propulsant à 101 durant l’été 2021, son plus haut niveau depuis 2007.

Et c’est à ce moment que l’inflation a commencé à se réveiller. Depuis lors, et bien avant le début de la guerre en Ukraine, l’indice n’a fait que baisser et est actuellement à un niveau de 96, historiquement bas puisque jamais atteint depuis une quarantaine d’années.

Ceci va probablement déclencher une nette baisse de la consommation et possiblement une récession.

Un mouvement qui touche toute l’Europe

Durant la crise du Covid-19, les consommateurs allemands ont quant à eux connu leur premier épisode de pessimisme depuis 2010, avec un indice descendu à 99. L’Allemagne est en effet un des pays d’Europe qui a renoué le plus rapidement avec la croissance après la crise du Covid-19. Mais là aussi, le rebond a été de courte durée, et le pessimisme est actuellement très important. Au vu des problèmes énergétiques auxquels l'Allemagne va être confrontée, il est probable que ce mouvement à la baisse se poursuive au-delà du niveau actuel de 96.

Dans les autres grands pays européens, le mouvement est identique :

- Au Royaume-Uni, la crise du Covid a mis fin à une longue période d’optimisme. La crise actuelle a fait plonger le pessimisme à un niveau incroyablement faible, la confiance n’étant plus que de 93, un niveau inconnu depuis la création de l’indice en 1974 ;

- En Espagne, la confiance est également à un niveau de 93, retrouvant les pires niveaux de la crise immobilière il y a 15 ans, lors des deux pics de récession qu’a connus le pays en 2008 et 2012.

- En Italie, l’indice de confiance des consommateurs a pratiquement été en permanence supérieur à 100 entre mai 2015 et fin 2021. Il est actuellement à 97, au même niveau que lors de la crise de 2013. La crise politique qui ronge ce pays devrait continuer à le faire baisser.

En Belgique, en Suisse, et, dans une moindre mesure aux Pays-Bas, la confiance des consommateurs a été particulièrement stable depuis 2011, restant au niveau de sa moyenne historique. On note que l’indice suisse a été plus affecté par les crises de 2008 et de 2020 que les indices belge et néerlandais. Actuellement, la confiance se situe à 98 dans les deux pays francophones et à près de 96 aux Pays-Bas.

Dans « l’Europe du Sud », le Portugal et la Grèce ont connu des variations similaires de leur indice de confiance des consommateurs, au plus bas depuis 10 à 15 ans.

La déprime américaine se poursuit

La confiance des consommateurs américains a globalement suivi celle des consommateurs européens depuis la crise des subprimes, avant de retrouver cinq ans d’optimisme. En revanche, contrairement à l’Europe, le consommateur américain n’a jamais retrouvé l’optimisme après la crise du Covid. Dès l’été 2021, avec les débuts du retour de l’inflation, la tendance à l’amélioration du moral s’est inversée pour atteindre le niveau actuel de 96, proche des niveaux français et allemands, et supérieur au niveau moyen de la zone euro de 95.

Une sinistrose mondiale

La situation est très différente en Chine, où le pessimisme a longtemps prédominé entre 2003 et 2016. Ce n’est qu’à partir de 2017 que le consommateur chinois est vraiment devenu fortement optimiste, et il l’est resté même durant la crise du Covid, qui a beaucoup moins touché le pays. La chute vertigineuse survenue en février 2022 est donc d’autant plus impressionnante, l’indice étant passé de 103 à 91 en quelques semaines. À l’exception du cas particulier des pays baltes, la Chine remporte la palme du plus grand pessimisme mondial.

En Russie, les consommateurs n’ont pas confiance en l’avenir depuis la crise de 2014. Début 2022, l’indice de confiance n’était que de 96, et est un peu remonté depuis.

Le moral du consommateur brésilien a été relativement peu affecté par la crise du Covid, et aucunement par la crise de 2022. Il s’approche actuellement de sa moyenne historique de 100. Le consommateur indien, pour sa part, a été lourdement affecté par la crise du Covid, mais il n’est pas non plus touché par la crise de 2022, et son optimisme continue à remonter. Un nouvel adage va-t-il naître : « Pas de sanctions, pas de récession… » ?

La presse annonçant les prévisions de croissance pour 2022 pour le Brésil (+2,7 %) et l’Inde (+7,7 %)

Le Canada et le Japon ont connu des trajectoires assez proches, le consommateur nippon étant plus pessimiste depuis 10 ans en raison du contexte économique dégradé. Les indices actuels ressortent respectivement à 98 et 97.

Au niveau planétaire, les grandes zones économiques plongent dans le pessimisme, même les BRICS, tirés vers le bas par la Chine.

Si on regarde les 8 plus grandes puissances mondiales représentant les deux tiers du PIB mondial, on constate que la sinistrose est généralisée, ce qui va poser de gros problèmes vu le niveau d’interdépendance économique planétaire.

En conclusion, si la crise du Covid a durement frappé l’économie mondiale, la crise de 2021-2022 s’annonce autrement plus violente, puisqu'aucune zone importante de la Planète ne semble pouvoir soutenir la croissance et amortir les chocs. C’est également vrai pour la France, qui n’a plus connu un optimisme durable du consommateur depuis la crise des subprimes, il y a 15 ans...

La déconstruction rapide de la mondialisation qui va se dérouler dans les trimestres et années à venir ne sera probablement pas heureuse.

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