La crise de l'hyperspéculation a révélé les dérives d'un monde devenu fou, selon l'ancien Président du Conseil Supérieur de l’Ordre des Experts-Comptables. Dans cet entretien inédit réalisé par Olivier Berruyer en 2012, René Ricol dénonce le manque de solidarité nationale des leaders économiques qui délocalisent sans réfléchir, parfois contre les intérêts du pays. Il accuse les financiers d'être devenus doctrinaires, au point de sombrer dans l'absurde, et milite pour une coordination entre normes comptables et régulation financière.
René Ricol (1950 -) est une personnalité française du milieu de la finance. Ancien expert-comptable, il a également été Président de la Compagnie Nationale des Commissaires aux Comptes (1985-1989), Président du Conseil Supérieur de l’Ordre des Experts-Comptables (1994-1998) ainsi que Président du board de la Fédération Internationale des Experts-Comptables (2002-2004). Il a également conseillé le président Nicolas Sarkozy au moment de la crise de 2008.
Olivier Berruyer (Élucid) : M. Ricol, quel regard portez-vous sur la crise que nous traversons ?
René Ricol : Quand j’ai commencé à travailler, en 1973, la France était excédentaire en offres d’emplois. Il n’était pas compliqué de trouver du travail. Je me préparais à exercer un métier — expert-comptable et commissaire aux comptes, que j’ai quitté depuis — dans lequel on considérait que la règle absolue était la prudence. Il fallait provisionner tous les risques. Le système économique disposait de nombreux matelas de sécurité. Il était par ailleurs très facile d’entreprendre.
En somme, la France était un pays formidablement puissant, avec de grands groupes au rayonnement mondial et un vrai leadership international. On n’était pas très loin de l’époque où Kennedy, élu président des États-Unis, était venu en France rendre visite au Général de Gaulle. L’activité entrepreneuriale était débordante.
Aujourd’hui, il est extrêmement difficile de trouver du travail même pour les hyper diplômés. De même, la règle s’est inversée concernant les provisions : il est plus condamnable de provisionner plutôt que de ne pas le faire. Il faut externaliser tout le résultat possible, presque par anticipation. Il est aussi plus compliqué d’entreprendre. Nos grands groupes sont toujours présents, mais ils ne sont plus détenus par des capitaux français. Nous sommes passés à une véritable globalisation, pour les personnes, les biens, les capitaux.
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