L’industrie de défense française est une des seules industries françaises (avec celle du cinéma) qui ne s’est pas effondrée. Coïncidence ou non, le secteur de la défense (et celui du cinéma avec l’exception culturelle) était le seul jusqu’à présent à échapper à l’application des règles des traités européens. La France a donc pu conserver une politique industrielle souveraine sur ce secteur en appliquant tout ce que les traités interdisent au reste de l’économie : préférence nationale, aides d’États, fort contrôle des capitaux, chaînes d’approvisionnement et de sous-traitance majoritairement localisées en France (c’est-à-dire sans délocalisations). Dès lors, quand pour la première fois depuis 1954, « l’Europe » ambitionne de toucher à ce secteur, il faut immédiatement se demander quels sont les risques de cette européanisation pour l’industrie nationale de défense et, par conséquent, pour l’autonomie stratégique militaire de la France. Car en matière européenne, tout ce qui peut mal tourner, tournera mal.

Cet article est le premier d’une série de trois sur les projets de défense européenne et leurs implications pour l’autonomie stratégique française, c’est-à-dire la capacité de la France à assurer de manière indépendante la protection de sa souveraineté, de ses intérêts vitaux et de sa sécurité, sans dépendre de manière décisive d'alliés ou de partenaires étrangers.
Face à la menace que fait planer Donald Trump de ne pas rendre automatique l’implication des États-Unis en cas d’attaque contre un État européen, notamment par la Russie, ces derniers (les pays d’Europe de l’Est en particulier) ont pris conscience de leur vulnérabilité en matière de défense, que ce soit en matière de troupes, de matériels, mais aussi et surtout de capacité à produire sur le sol européen des équipements militaires (ex. : chars, missile, système de défense sol-air, drones, etc.). Le constat est tout fait juste, nous y reviendrons.
Pour répondre à cette inquiétude (panique), la Commission européenne a multiplié les initiatives, annonces et propositions avec, récemment, la publication d’un Livre blanc de la défense, d’un projet de règlement européen intitulé « EDIP » et d’un plan « Rearm Europe 2030 », et la nomination pour la première fois de son histoire – en violation des traités – d’un commissaire européen à la défense.
Sur le papier, cela n’est pas une mauvaise chose, tant les industries nationales de défense, sous-dotées depuis des années, ont vu leur capacité de production s’effondrer considérablement depuis la fin de la Guerre froide (ce qui n’était pas illogique) et leur dépendance vis-à-vis des États-Unis s’accroître (de manière plus ou moins forte selon les États). Mais ne sous-estimons pas la capacité de l’Union européenne à ruiner et détruire tout ce qu’elle touche et à rater tout ce qu’elle entreprend.
Lisez la suite et soutenez un média indépendant sans publicité
S’abonnerAccès illimité au site à partir de 1€
Déjà abonné ? Connectez-vous
2 commentaires
Devenez abonné !
Vous souhaitez pouvoir commenter nos articles et échanger avec notre communauté de lecteurs ? Abonnez-vous pour accéder à cette fonctionnalité.
S'abonner