Érigée depuis plusieurs années en priorité de l’action gouvernementale, la réindustrialisation de l’économie française tarde à produire ses effets. Plusieurs verrous, d’ordre idéologique et politique, s’opposent concrètement à une telle ambition, des verrous que le pouvoir actuel est sans doute le moins apte à faire sauter.

publié le 01/05/2024 Par Éric Juillot

Pendant près de quarante ans, la France a laissé sciemment décliner son industrie. Quand elles ne chantaient pas les louanges d’une société post-industrielle, les élites se résignaient à la disparition de pans entiers de l’appareil productif au nom de l’adaptation inévitable à la mondialisation. Les effets délétères d’une désindustrialisation poussée ont cependant fini par les atteindre.

Il faut dire qu’ils touchent un large spectre de domaines, au-delà même de l’économie : croissance, productivité, comptes extérieurs, cohésion territoriale, confiance des électeurs dans la puissance publique, poids géopolitique, souveraineté, sécurité des approvisionnements… Il semble rétrospectivement inconcevable que la question industrielle ait été pendant si longtemps traitée avec tant d’indifférence.

Les résultats en demi-teinte d’une politique vidée de son contenu

Toute la question est de savoir, désormais, si la prise de conscience récente des responsables politiques est de nature à inverser réellement le déclin tendanciel de l’industrie française. À ce jour, les résultats du volontarisme politique affiché depuis plusieurs années par le chef de l’État et les ministres concernés ne sont pas convaincants. La communication gouvernementale met en avant des investissements d’ampleur dans des usines géantes dans les Hauts-de-France ou dans la région de Grenoble, mais ceux-ci, quoi que spectaculaires, n’auront pas à eux seuls d’effet macro-économique notable. Elle insiste également sur le solde des créations et destructions d’usines en France, devenu positif ces dernières années, mais cet indicateur, grossier, ne dit rien du nombre d’emplois, du niveau d’investissement, du chiffre d’affaires attendu, des branches concernées – un solde positif étant tout à fait compatible avec le déclin continu du secteur industriel.

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